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LES EGLISES PENTECOTISTES

Cf. PDL, p. 73.74; W. Kreiss, Le Mouvement Charismatique / Le parler en langues et le baptême dans l'Esprit, C.E.T., 1985; Neil Babcox, Ma recherche charismatique, Maison de la Bible, 1992.

Nous distinguerons entre les Eglises pentecôtistes proprement dites et ce qu'on appelle le néo-pentecôtisme, mouvement plus récent qui a pénétré dans la plupart des Eglises de la chrétienté. Il existe des parentés indéniables entre les deux, mais il convient de ne pas les confondre.

Les Eglises pentecôtistes qui connaissent bien des divisions internes (certaines aux Etats-Unis vont jusqu'à nier la Trinité), ont pour point commun leur affirmation de la "plénitude de l'Esprit" et font revivre parmi elles les dons extraordinaires du Saint-Esprit, tels que la glossolalie, les révélations particulières et la guérison des malades par imposition des mains. Les Assemblées de Dieu forment sans doute la plus authentique, la plus grande et la plus sérieuse des communautés pentecôtistes.

Le fondateur historique du pentecôtisme fut Charles F. Parham, pasteur de l'Ecole Biblique de Topeka, Kansas, aux U.S.A. Le Saint-Esprit serait descendu sur lui, à la fin du siècle dernier, comme il descendit jadis sur les apôtres réunis à Jérusalem. Le 3 janvier 1901, il fonda en Californie de petites "assemblées de Dieu". Un prédicateur noir, W.J. Seymour, prit la tête du mouvement en 1906. Ces petits groupes priaient jusqu'à ce que le Saint-Esprit descendît sur eux, les mettant en extase et leur permettant de prononcer des paroles incompréhensibles. L'atmosphère surexcitée qui les caractérisait attira les foules en quête de surnaturel. Ces gens avaient pour mission de rester fidèles à leurs Eglises et d'y introduire les bénédictions de ce qu'on appelle le baptême du Saint-Esprit.

Se heurtant à de nombreuses oppositions, ils constituèrent des communautés portant des étiquettes diverses. Des Etats-Unis elles se répandirent rapidement en Grande-Bretagne, en Suède, en Norvège, en Allemagne et ailleurs. En 1929, le prédicateur pentecôtiste anglais Douglas Scott se rendit en France, y implanta le pentecôtisme grâce à une intense propagande orale et écrite et des campagnes de réveil et de guérisons, et fonda la première communauté de ce nom au Havre. A l'heure actuelle, le pentecôtisme a pris pied dans tous les départements français.

Le nombre réel de ses adhérents est difficile à vérifier. On parle d'un total de 60.000.000. Le Brésil en compte 6.000.000, l'Europe 4.200.000, les Etats-Unis 4.000.000, l'ancienne U.R.S.S. 3.000.000, l'Indonésie 2.000.000. Une énorme paroisse pentecôtiste de Séoul en Corée compterait à elle seule 300.000 membres. Selon des statistiques de 1987, il y aurait en France 85.000 pentecôtistes actifs, plus environ 5.000 gitans (Mission Evangélique des Tziganes de France), avec 450 lieux de culte dont 8 à Paris et 16 en banlieue, desservis par 300 pasteurs. La plupart des Eglises sont regroupées dans l'Union Nationale des Assemblées de Dieu de France.

Il est indéniable que les pentecôtistes ont connu un grand succès à l'échelon mondial. Il y a à cela plusieurs facteurs: l'effervescence actuelle de notre civilisation, son insécurité spirituelle et morale, l'infidélité de tant d'Eglises à l'Evangile du salut et peut-être leur excès d'institutionnalisation et le cadre rigide de leur vie cultuelle, la tiédeur religieuse et le manque de chaleur des Eglises, l'appel aux sens et aux émotions, l'exacerbation des sentiments, l'instabilité émotionnelle de beaucoup de gens, la recherche du surnaturel, du sensationnel et du spectaculaire, etc. Les Eglises pentecôtistes recrutent bon nombre de leurs fidèles parmi les gens perturbés, les traumatisés, les victimes de l'injustice et de l'indifférence générale, les gens profondément marqués par la vie qui recherchent de la compréhension et un soutien spirituel, un entourage chaleureux qui les aide à résoudre leurs problèmes et à porter leurs fardeaux. Ce n'est pas faire preuve d'injustice ou de parti pris que de dire que beaucoup de leurs membres se signalent par un déséquilibre émotif indéniable. Sans doute l'aptitude de ces Eglises à toucher et gagner ces gens est-elle matière à réflexion pour les autres communautés chrétiennes, mais sans que pour autant elles aient à recourir aux moyens qu'elles utilisent. Au lieu de s'efforcer de rendre l'équilibre aux gens par une foi sobre et saine dans les promesses de l'Evangile, les Eglises pentecôtistes les incitent presque toujours à une exaltation qui n'est pas compatible avec l'Ecriture Sainte.

Parallèlement aux Eglises pentecôtistes, et pour des raisons semblables, un large mouvement charismatique appelé néo-pentecôtisme traverse la plupart des Eglises de la chrétienté et pénètre jusque dans les Eglises catholique et luthérienne pourtant, de par leur doctrine, peu enclines à ce type de théologie et de piété. Des groupements se créent à l'intérieur de ces Eglises, insistant sur la nécessité du baptême du Saint-Esprit et sur la notion de plénitude de l'Esprit qui se manifeste par des charismes surnaturels. Ce qui pourrait être une semence de réveil n'est souvent qu'un facteur de dissensions contribuant à égarer les âmes en quête de paix et d'espérance.

Les Eglises pentecôtistes sont généralement, mais pas toujours, fondamentalistes et souscrivent à l'inspiration plénière et l'inerrance de la Bible et aux grands dogmes de la foi chrétienne. De tendance baptiste, elles n'administrent pas le Baptême aux enfants, le pratiquent par immersion et lui confèrent une valeur exclusivement symbolique. Il en va de même de la Sainte Cène. Elles résument leur foi en douze articles dont nous retiendrons les deux suivants, parce qu'ils sont caractéristiques de leur attitude doctrinale:

"Le Baptême du Saint-Esprit, dont le signe initial est le parler en langues" (Article 6).

"La guérison divine, c'est-à-dire la délivrance de la maladie, acquise par le sacrifice de Jésus au Calvaire" (Article 8).

Le baptême du Saint-Esprit:

Les pentecôtistes enseignent que

"tous les croyants sont suceptibles de recevoir la promesse du Père, le baptême par l'Esprit et le feu, selon le commandement de notre Seigneur Jésus-Christ. Ils devraient tous attendre ardemment cette promesse et en rechercher l'accomplissement avec ferveur. C'était l'expérience ordinaire de tous les membres de l'ancienne Eglise chrétienne" (Statement of Fundamental Truths, Article 7).

"L'Ecriture tout entière enseigne que la régénération concerne le pécheur... Le baptême du Saint-Esprit concerne seulement ceux qui se sont déjà repentis et qui croient, ceux qui sont déjà enfants de Dieu" (W.T. Gaston, The New Birth and the Baptism in the Holy Spirit).

"C'est pourquoi il est évident que la réception du Saint-Esprit dont nous parlons maintenant n'a rien à voir avec le fait de conduire les hommes à la foi et à la repentance. C'est quelque chose qui s'accomplit ultérieurement, une bénédiction supplémentaire et distincte. C'est un privilège qui se fonde sur la foi qui agit dans le coeur" (William Kelley, cité dans R.M. Riggs, The Spirit Himself, p. 55).

"Un homme peut être régénéré par le Saint-Esprit sans avoir pour autant reçu le don du Saint-Esprit. Dans la régénération, le Saint-Esprit fait don de la vie, et celui qui le reçoit est sauvé. Dans le baptême du Saint-Esprit, par contre, il est fait don d'une puissance, et celui qui la reçoit est apte au service" (R.A. Torrey, in R.M. Riggs, The Spirit Himself, p. 48).

On distingue ainsi entre la régénération et le baptême du Saint-Esprit qu'on oppose au Baptême institué par le Christ et dans lequel on prétend que l'Esprit Saint n'agit pas. Cette grave erreur se fonde sur une fausse interprétation de textes bibliques tels que Luc 3:16; Jean 7:39; Actes 1:8. Elle est d'autant plus grave que le pentecôtisme enseigne non seulement que tout croyant peut accéder à ce baptême, mais qu'il doit aussi tout faire pour le recevoir. Quiconque ne parle pas en langues ne l'a pas reçu et montre par là qu'il fait obstacle d'une façon ou d'une autre à l'action du Saint-Esprit. Cf. sa réfutation dans W. Kreiss, Le Mouvement Charismatique, p. 17 ss.

La glossolalie:

Le terme vient de deux mots grecs qui signifient "parler en langues". Il s'agit d'un don particulier que les apôtres avaient reçu le jour de la Pentecôte, lorsqu'ils se mirent à louer Dieu en des langues étrangères comprises des juifs de la diaspora venus en pèlerinage à Jérusalem (Actes 2:9-11). On appelle cela aussi la xénoglossie, l'aptitude surnaturelle et miraculeuse à s'exprimer intelligiblement en des langues étrangères qu'on n'a pas apprises.

Un grand débat s'est instauré autour de la question de savoir si la glossolalie pratiquée dans l'Eglise de Corinthe (1 Corinthiens 14) et par les pentecôtistes concerne des langues étrangères, mortes ou vivantes, ou un langage extatique consistant à s'exprimer en des sons inarticulés n'appartenant à aucune langue. Nous ne pouvons pas entrer ici dans ces détails. Cf. son étude détaillée dans W. Kreiss, Le Mouvement Charismatique, p. 3-12. Qu'il suffise de rappeler que la glossolalie n'était pas dans l'Eglise primitive un don aussi répandu que le prétendent les pentecôtistes. On en parle dans Actes 2, 8, 10 et 19, ainsi que dans 1 Corinthiens 14. Elle n'était certainement pas une pratique habituelle dans les paroisses fondées par l'apôtre Paul. D'autre part, Paul qui ne décourage pas la pratique de ce don, lui assigne des limites bien précises et ne veut pas qu'elle donne lieu à des abus. Les vrais réveils religieux dans le monde ont lieu non pas par la pratique de la glossolalie, mais par une repentance et une foi sincères. D'autre part, le phénomène n'est pas propre au christianisme. On le retrouve dans de nombreuses religions païennes. Pour induire le parler en langues, on recourt à des procédés qui exacerbent les émotions et les sens et à des techniques peu compatibles avec l'exercice d'un don qu'on dit venir du Saint-Esprit. Il semble résulter d'un état de transes qui n'a rien de particulièrement chrétien et être la manifestation d'une ambiance surexcitée peu compatible avec la foi et la piété telles qu'elles sont décrites dans la Bible. On peut même se demander s'il n'est pas l'expression d'un état de délire au travers duquel se manifestent des puissances malsaines.

Le don de guérison:

L'imposition des mains pour la guérison des malades est la deuxième grande composante de l'activité des pentecôtistes. On imagine donc facilement que beaucoup de malades gravement atteints, déçus par la médecine ou pour qui elle est suspecte, se tournent vers ces Eglises et fréquentent assidûment leurs réunions en quête d'une guérison. Selon leur théologie, Jésus-Christ n'est pas seulement mort en expiant nos péchés, mais il a porté aussi nos maladies, nous acquérant à la fois le pardon et la guérison. Celle-ci peut être obtenue aussi sûrement par la foi que la rémission des péchés. Et si un malade ne guérit pas, c'est qu'il n'a pas la foi ou pas assez de foi et qu'il doute. L'obstacle à la guérison est donc chez lui.

Cette conviction procède d'une fausse interprétation de textes comme Esaïe 53:4.5 et Psaume 103:2.3, comme il est tout à fait faux de dire que toute maladie est en rapport direct avec un péché (Jean 9:3). C'est ignorer totalement le pourquoi de la maladie et de toute épreuve que Dieu impose à ses enfants (Jean 11:4; Romains 5:1-11).

Enseigner une telle théologie, c'est pousser bien des malades qui ne guérissent pas au désespoir, en leur laissant croire qu'ils élèvent un obstacle entre Dieu et leur guérison. C'est aussi, et cela se fait couramment, inciter les malades à ne pas recourir aux soins de la médecine. Enfin, c'est déplacer le centre de gravité du christianisme. Il est fort peu question chez les pentecôtistes du Christ et de sa rédemption. De même qu'ils placent le Saint-Esprit au-dessus de Jésus-Christ, de même ils situent la guérison au centre de leur message et de leurs activités. Les affiches annonçant leurs meetings promettent davantage la guérison aux malades que l'annonce de l'Evangile du salut aux pécheurs!

Enfin, ce qui est vrai du parler en langues l'est aussi de la guérison par imposition des mains. Il est intéressant de constater que la très grande majorité des cas de guérison dont les pentecôtistes font état ont lieu en public, au cours de grands meetings où jouent sans aucun doute des phénomènes de psychologie des foules, une forme d'intoxication religieuse, l'état second engendré par une certaine ambiance. On sait que beaucoup de maladies sont psychosomatiques, qu'une névrose peut présenter des symptômes physiologiques. On sait aussi que beaucoup de ceux qui fréquentent ce genre de meetings sont des gens souffrant d'un certain déséquilibre psychique, des angoissés qui se sentent bien mal dans leur peau. Ils n'attendent qu'une chose, d'être délivrés de leur mal, en ignorant que le pardon, le salut et la paix qu'on trouve en Christ passent avant cela, que Dieu peut guérir en exauçant de simples prières prononcées dans le secret de la chambre, sans imposition des mains spectaculaire, comme il peut aussi décider de ne pas guérir son enfant, quand il estime que cela lui est salutaire ou que cela contribue à la gloire de son nom. Autant de données bibliques que méconnaissent les pentecôtistes, en faveur d'une piété qui laisse pensif et soulève bien des interrogations.

 

Questions de révision et exercices:

 


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13-février-2001, Rev. David Milette.