LE MONDE DE L'ANCIEN TESTAMENT, par Dr. Wilbert Kreiss - index  LE MONDE DE L'ANCIEN TESTAMENT, par Dr. Wilbert Kreiss - index


 

CHAPITRE 1: BIBLE ET ARCHEOLOGIE

La Bible, Parole inspirée de Dieu, est pour l'Eglise chrétienne l'unique source et norme de foi et de vie. Elle est aussi, et de très loin, sa principale source d'information sur l'histoire du Moyen Orient ancien, et plus particulièrement d'Israël, le peuple que Dieu s'est choisi pour accomplir son plan de salut. Les informations qu'elle nous donne sont sûres et dignes de foi. Au siècle dernier, des intellectuels ennemis du christianisme étaient convaincus du contraire. Ils pensaient par exemple que le Pentateuque n'avait pas pu être rédigé par Moïse parce que, disaient-ils, l'écriture n'était pas connue à cette époque, ou que le peuple des Héthiens dont parle la Bible n'avait jamais existé. Les deux thèses se sont avérées entièrement fausses. La découverte à Suse, en 1901, du code d'Hammourabi prouvait que l'écriture était connue dans cette partie du monde au XVIII° siècle av. J.-C., et les recherches archéologiques ont prouvé l'existence de l'importante civilisation des Hittites (ou Héthiens), apportant un autre démenti à la science critique qui visait à détruire l'autorité de la Bible. Celle-ci est dans tout ce qu'elle affirme, y compris quand elle parle d'histoire, un document sûr et digne de foi, parce que Dieu a voulu qu'elle soit cela pour l'instruction de son peuple, l'Eglise chrétienne.

Mais pour bien comprendre l'Ancien Testament, il faut connaître la géographie de cette partie du monde, l'histoire économique, politique et militaire non seulement d'Israël, mais aussi des nations qui ont vécu dans son entourage, les religions et les coutumes de l'époque. Beaucoup de choses sont passées sous silence ou simplement résumées dans la Bible, parce qu'elles allaient de soi pour ses lecteurs de l'époque, alors que nous avons souvent bien du mal à comprendre les faits et gestes des personnages bibliques, du fait que nous ne connaissons pas suffisamment le milieu dans lequel vivait Israël. Deux exemples parmi d'autres: On se demande comment Abraham pouvait être considéré comme un homme de foi intègre, alors que pour se protéger, il fit passer sa femme pour sa soeur, avec tous les risques que cela comportait pour elle. Nous comprenons aussi mal comment Sara a pu imaginer d'encourager son mari Abraham à coucher avec Agar, sa servante, pour engendrer un fils, et aucune femme n'aurait cette idée de nos jours. Prêt d'utérus, avec les moyens de l'époque! Mais une meilleure connaissance des coutumes antiques nous y aide. Tout cela pour dire que les informations venant de l'extérieur nous permettent souvent de mieux comprendre l'Ecriture Sainte. Et dans ce domaine, nous devons beaucoup à l'archéologie.

Les informations que nous fournit la Bible, le plus vieux document qui nous soit parvenu sous forme d'un livre, sont sûres. Mais d'une part elles se limitent à une région restreinte du globe, et d'autre part il s'agit souvent de résumés. Et ces derniers peuvent être très succincts. Ainsi, les onze premiers chapitres de la Bible couvrent toute l'histoire du monde depuis sa création jusqu'à l'époque d'Abraham, soit au bas mot deux mille ans. C'est comme si on voulait écrire l'histoire de la France depuis ses origines les plus lointaines en une dizaine de chapitres. Il faudrait en prendre des raccourcis!

Alors les renseignements fournis par l'archéologie, source d'information souvent encore plus ancienne que la Bible, sont précieux et permettent de se faire une image plus complète de ce qui s'est passé. Qu'on y pense: Abraham naquit et grandit dans ce qu'on appela plus tard la Babylonie (aujourd'hui l'Irak). Il fréquenta les peuples de la Mésopotamie dont la Bible ne nous dit vraiment pas grand-chose, vécut un moment en Egypte, puis alla s'installer en Canaan. David, véritable fondateur de la nation d'Israël, eut affaire à de nombreux peuples ou ethnies tels que les Jébusiens, les Philistins, les Amalécites, les Moabites, les Ammonites, les Araméens et les Edomites. Salomon entretenait des relations diplomatiques et commerciales avec les Phéniciens, les peuples du Golfe Persique et d'autres plus éloignés encore. L'archéologie nous apprend beaucoup sur ces peuples aujourd'hui éteints.

Voici quelques-unes de ses découvertes les plus importantes pour une meilleure connaissance du monde de l'Ancien Testament.

 

Egypte:

La pierre de Rosette: Copie d'un décret honorant Ptolémée V Epiphane en 196 av. J.-C., trouvée en 1799 à Rosette près de l'embouchure du Nil. Elle fournit à Champollion (1790-1832) la clé qui lui permit de déchiffrer les hiéroglyphes égyptiens.

Les tablettes d'Amarna: Tell el-Amarna est l'appellation moderne d'un site égyptien à environ 300 km au sud du Caire et appelé dans l'Antiquité Akhetaton, capitale et enceinte sacrée d'Amenhotep ou Aménophis IV (pharaon de la XVIII° dynastie, 1370-1353 av. J.-C.). En fouillant dans une décharge publique, une femme égyptienne y trouva en 1887 trois cents tablettes portant des inscriptions babyloniennes. C'étaient les restes d'une correspondance entre le pharaon et les rois vassaux et gouverneurs de Mésopotamie, de Syrie et de Palestine datant environ de l'époque de l'Exode. Il y est question de Hittites, d'Amoréens et de villes comme Sidon, Tyr et Jérusalem. On y parle aussi d'envahisseurs "Habiru" contre lesquels des princes demandent au pharaon de les protéger. Certains pensent qu'il s'agissait des Hébreux s'installant en Canaan, mais les savants ne sont pas d'accord à ce sujet.

Les fameuses pyramides, dont celles de Guizèh et le Grand Sphinx. L'avenue des Sphinx (141 au total) conduisant au temple d'Osiris-Apis fut découverte en 1850. A quoi il faut ajouter la découverte de tombes renfermant des peintures, du mobilier, des textes littéraires gravés dans la pierre ou écrits sur du papyrus. Tout cela a permis d'approfondir notre connaissance de la religion égyptienne et de son influence sur les esclaves israélites. Les villes de Pithom et de Ramsès ont été identifiées. Une stèle du pharaon Merneptah (1224-1216 av. J.-C.) fait mention d'Israël.

 

Mésopotamie:

La Mésopotamie, le pays entre les fleuves (le Tigre et l'Euphrate), fut habitée avant l'an 3000 av. J.-C. par les Sumériens, peuple non sémite qui inventa une écriture pictographique auquel succédèrent les Akkadiens, groupe sémite venu du nord. Entre 2000 et 1700 av. J.-C.. les Amoréens, sémites venus de l'occident, envahirent le pays et étendirent leur domination de la Méditerranée à la Babylonie. C'est à cette époque que régna Hammourabi et que se constituèrent les empires assyrien puis babylonien. avec lesquels les Israélites entretinrent des relations prolongées, variées et parfois douloureuses.

En 1889, on découvrit à Nippur les restes d'une vaste bibliothèque. Plus de 20.000 tablettes datant du 3° millénaire av. J.-C., dont la fameuse épopée de Gilgamesh, ancien récit sumérien du déluge dont il existe encore une autre version provenant de la bibliothèque d'Assurbanipal (7° siècle av. J.-C.). Les dieux ayant décidé de détruire le monde entier, un certain Ziusudra parut devant leur conseil pour protester contre la destruction de l'humanité. Il fut alors autorisé à construire une arche. Le déluge vint détruire le monde, et quand les eaux se furent retirées, on offrit aux dieux des sacrifices de boeufs et de moutons.

Le code d'Hammourabi: Découvert en 1901 à Suse (actuel Iran), dont Darius et Xerxès avaient fait leur capitale, il s'agit d'une grande pierre noire conservée au Musée du Louvre sur laquelle sont gravées les lois d'Hammourabi, avec l'image d'un roi debout recevant le code des mains d'un dieu assis.

La grande ziggurat ou temple de Marduk de Babylone, faite de six plateformes carrées dont la dernière portait une petite chapelle destinée au dieu Marduk. Il s'agit peut-être de la tour de Babel de Genèse 11. En venant du nord, on passait près du palais d'été de Nebucadnetsar et d'un deuxième palais, avant d'entrer par la porte d'Ishtar à l'intérieur de la ville avec ses fameux jardins suspendus construits en l'honneur de la reine et évoquant le paysage montagneux de son pays natal.

Ur en Chaldée: C'était le pays d'Abraham. Son site avec sa ziggurat surmontée d'un petit temple consacré à Nannar, dieu de la lune, fut identifié en 1853. Sa fondation révéla qu'il fut construit par un roi en 3000 av. J.-C. Non loin de là, des fosses révèlent la pratique de sacrifices humains lors d'enterrements royaux. Statues, bas-reliefs représentant des scènes de la vie de tous les jours et de nombreux objets d'art témoignent du degré avancé de la civilisation présumérienne et sumérienne.

Calach: Ville située sur la rive est du Tigre, à 36 km au sud de Ninive, où fut découvert le célèbre obélisque noir de Salmanasar III (859-824 av. J.-C.). Il montre Jéhu roi d'Israël et d'autres vassaux apportant leur tribut au souverain assyrien. En 853 av. J.-C., en effet, à Karkar en Syrie, Salmanasar avait défait la coalition de Syrie et d'Israël.

Ninive: Sur la rive est du Tigre, on découvrit sous deux tertres les restes de l'ancienne Ninive et les ruines impressionnantes des palais de Sanchérib (705-681 av. J.-C.) et d'Assurbanipal (669-627 av. J.-C.). Sanchérib avait fait de la ville la capitale de l'Assyrie. Les ruines des anciennes murailles, longues de 12 km, montrent que la ville s'étendait sur 4 km le long du fleuve. Temple de Nébo, scènes de chasse, bibliothèque royale d'Assurbanipal avec l'épopée de Gilgamesh (récit babylonien du déluge) et un récit de la création fort différent de celui de la Bible (Enuma Elish), ainsi que d'innombrables tablettes fournissant une histoire complète de l'Assyrie font partie des trésors archéologiques découverts sur le site.

Mari: Ville antique de la Mésopotamie, sur la rive droite de l'Euphrate où on découvrit les ruines de quatre temples de la déesse Ishtar, une ziggurat, un palais d'environ 300 chambres s'étendant sur sept hectares et 20.000 tablettes écrites en akkadien et contenant la correspondance entre le dernier roi de Mari et Hammourabi, fondateur de l'empire babylonien qui conquit la ville.

A Nuzi, à l'est d'Assur, dans l'actuel Irak, des fouilles menées entre 1925 et 1931 ont jeté beaucoup de lumière sur certaines coutumes sociales (mariage, adoption) décrites dans la Genèse. Les tablettes découvertes avaient été écrites par des scribes appartenant au peuple des Horiens (ou Hurrites) que la Bible était seule à mentionner (Genèse 14:6). Les fouilles de Mari ont confirmé elles aussi la véracité du texte biblique.

Ces tablettes nous aident à comprendre pourquoi Abraham fit passer sa femme Sara pour sa soeur, pourquoi Rachel prit avec elle les dieux de la maison de son père Laban (Genèse 31:19) et pourquoi une jeune esclave fut mise au service des fiancées Léa et Rachel (Genèse 29:24.29). Dans la société horienne, en effet, les liens du mariage revêtaient un caractère très solennel, si la femme avait également le statut de soeur. Les textes de Nuzi révèlent par ailleurs que la propriété pouvait être transférée du père à son gendre, si les dieux de la maison avaient été remis au gendre comme un présent scellant son mariage. Enfin, une femme de la haute société qui n'avait pas de fils devait proposer une concubine à son mari et avait le droit de considérer le rejeton de la concubine comme son propre enfant.

 

Syrie:

Ougarit, l'actuel Ras Shamra, à 1 km de la Méditerranée au nord de la ville de Lattaquié, était grâce à son port un important centre de commerce. D'autre part, la route côtière de l'Egypte vers l'Asie Mineure passait par là. On y découvrit des temples dédiés à Baal et Dagon, la statuette d'une déesse de la fertilité et des amulettes en or représentant des femmes nues et attestant que le culte de la fécondité y était pratiqué, une grande stèle en pierre représentant Baal, des tablettes rédigées en une écriture cunéiforme inconnue auparavant. Les cinq couches du site montrent l'existence de cinq villes successives entre 5000 et 1200 av. J.-C.

Les nombreuses tablettes font état de la culture cananéenne à son apogée et fournissent des renseignements précieux sur le la religion de l'époque. El, le dieu suprême, était considéré comme le père des autres divinités, à l'exception de Baal appelé fils de Dagon. Tous devaient avoir sa permission avant de prendre des initiatives. Baal était le dieu de la guerre, de la pluie, de la tempête et de la fertilité, tandis que Môt était le dieu des saisons sèches, des fruits mûrs et de la semence.

 

Palestine:

Les recherches ont prouvé que la Palestine était habitée dès la fin de l'âge de pierre.

Guézer: Cette région était occupée très tôt par des peuples non sémites vivant dans des grottes, avant d'être envahie par des sémites vers 2500 av. J.-C. On y découvrit entre autres un tunnel à 29 mètres sous le rocher, destiné à amener l'eau dans Guézer en cas de siège. Le pharaon d'Egypte donna la ville à sa fille, quand celle-ci devint la femme de Salomon (1 Rois 9:16). Trouvaille particulièrement intéressante: un calendrier agricole.

Jérusalem: Les fouilles sont limitées du fait que l'actuelle Jérusalem se trouve sur le site même de l'ancienne ville. A signaler la découverte du tunnel que le roi Ezéchias fit creuser pour amener l'eau de la source de Guihon à la piscine de Siloé et ravitailler Jérusalem en eau lors du siège par l'armée assyrienne de Sanchérib en 701 av. J.-C. Des ouvriers creusèrent des deux côtés et se rejoignirent au centre du tunnel. Une inscription sur le mur, une des plus anciennes en hébreu, célèbre l'exploit.

Jéricho: Un des premiers sites palestiniens à avoir été habité, à 252 mètres sous le niveau de la mer et environ 9 km au nord-ouest de l'extrémité de la Mer Morte. Des excavations ont mis à jour un bâtiment ressemblant à un temple et datant de 4500 av. J.-C. Des murs qui semblent avoir été construits au XV° siècle furent détruits entre 1400 et 1350 av. J.-C., destruction qui pourrait bien évoquer celle menée à bien par Josué.

Lakis: Une des principales villes fortifiées de Juda, prise par Josué vers 1220 av. J.-C., dont Salomon fit par la suite une garnison abritant ses chars. Elle fut assiégée par Sanchérib en 701. Des textes écrits sur 21 tessons de poterie témoignent de la situation politique et militaire en Juda au temps de l'invasion de Nebucadnetsar.

Meguiddo: Une des plus anciennes villes de la Palestine conquise par Josué (Josué 12:21). Salomon la reconstruisit et en fit une ville de garnison. Les ruines d'un temple d'Astarté datant du VII° siècle av. J.-C. attestent qu'Israël pratiquait l'idolâtrie. D'autres fouilles dans des couches datant de l'époque de Salomon révélèrent l'existence de grandes écuries au sol dallé capables de recevoir 500 chevaux.

Samarie: Site habité depuis 3000 av. J.-C. où Omri installa la capitale de son royaume vers 850 av. J.-C. On y découvrit près de 200 plaques et objets en ivoire, dont certains portent des inscriptions. Sans doute les restes du palais en ivoire qu'Achab fils d'Omri y fit construire (1 Rois 22:39). D'autre part, 70 pièces de poterie portent des inscriptions en ancienne écriture hébraïque.

Enfin, Qirbet Qumrân est devenue célèbre par la découverte en 1947 et les années suivantes des rouleaux de la Mer Morte attribués à la communauté des Esséniens et datant de 130 av. J.-C. à 70 apr. J.-C. Le site fut démoli par les Romains en 135 apr. J.-C., lors d'un soulèvement des juifs. Les principaux manuscrits découverts sont les suivants: un rouleau complet d'Esaïe de 7,34 mètres de long, un rouleau incomplet du même prophète, un commentaire du prophète Habaquq, un apocryphe araméen de la Genèse, le Manuel de Discipline contenant les règles de la communauté de Qumrân, la Règle de la Guerre des Fils de la lumière contre les Fils des ténèbres (conseils tactiques sur la façon de mener une guerre entre les membres de la secte des Esséniens et leurs ennemis), et des hymnes semblables aux psaumes de l'Ancien Testament.

 

Questions de révision et exercices:

 


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15-Septembre-2002, Rev. David Milette.