LES PARABOLES DU SEIGNEUR, par Dr. Wilbert Kreiss - index  LES PARABOLES DU SEIGNEUR, par Dr. Wilbert Kreiss - index


 

LE FESTIN: Luc 14:16-24

Cette parabole figure aussi dans Matthieu 22:1-14 avec quelques variantes. Il n'est pas impossible que Jésus l'ait racontée plusieurs fois, devant des auditoires différents. D'ailleurs elle se situe chez Matthieu après son entrée dans Jérusalem, tandis que chez Luc elle trouve sa place dans un long discours parsemé de paraboles. La scène a lieu au cours d'un repas, après qu'un des convives se fut exclamé: "Heureux celui qui prendra son repas dans le royaume de Dieu". C'est à cet homme que Jésus répondit en racontant la parabole, mais il est évident que tous ceux qui étaient là profitèrent de son enseignement.

Un homme donna un grand souper:

Cet homme anonyme, non identifié, est Dieu lui-même. Jésus est à table, en train de souper, au moment où il raconte cette parabole. Il saisit l'occasion et prend au vol la réflexion faite par l'un des invités, se révélant un excellent pédagogue. Oui, le Royaume de Dieu est semblable à un repas. Pas n'importe lequel: un festin, un banquet de noces. Quand on sait toute l'importance que les hommes, et surtout les Orientaux, attachent à la convivialité et la joie et les rires qu'évoque un repas de noces, on imagine tout le bonheur que Dieu réserve aux siens. Seul un banquet peut illustrer, et il ne le fait que bien imparfaitement, les beautés et les joies du paradis.

Un festin ne s'improvise pas, mais requiert de longs préparatifs. Les préparatifs de Dieu recouvrent tout l'Ancien Testament, toute la mise en action et l'exécution du plan qu'il avait élaboré de toute éternité pour sauver le monde, et culminent dans la mort et la résurrection du Christ. C'est quand il vint dans le monde pour le racheter que tout fut "prêt". Et pourtant, les croyants de l'ancienne alliance étaient par anticipation invités à ces noces et ont bénéficié à l'avance des grâces que Dieu offre aux hommes en Jésus-Christ.

Il s'agit d'un "grand souper". Cet homme devait être riche. Dans Matthieu, Jésus indique qu'il s'agit d'un festin de noces qu'un roi offrit à son fils. Les noces de l'Agneau, précise l'Apocalypse (19:7.9). Dieu récompense son Fils pour avoir accompli son plan de salut et s'être acquitté de sa douloureuse mission. Il le "marie" en quelque sorte au peuple des croyants, rassemble autour de son trône d'innombrables élus avec qui il peut partager sa joie et sa gloire. "Tout est prêt", la rédemption est achevée, le repas messianique peut commencer.

Le maître de maison "invita beaucoup de gens". Ces nombreux convives étaient les Juifs, les compatriotes de Jésus, ceux qui l'avaient précédé dans le temps et ses contemporains. L'invitation avait eu lieu depuis longtemps, mais la date des noces ne leur avait pas été communiquée. Israël savait que son Messie Sauveur viendrait un jour, mais il ne savait pas quand. Maintenant que le festin était prêt, que le Royaume de Dieu était venu en la personne de Jésus, le Messie promis, il s'agissait de les convier, de les exhorter à venir, de les appeler à la foi en son nom. L'invitation, suivie de l'exhortation à venir, illustre tous les appels à la foi et au salut que Dieu a adressés à Israël depuis ses origines, par l'intermédiaire de ses prophètes, puis du Christ et des apôtres.

Tous unanimement se mirent à s'excuser:

Les excuses sont classiques. L'un a acheté un champ et doit aller l'inspecter. Le jour même, comme s'il craignait que son champ ne s'en aille! Un autre a acquis des boeufs. Pauvre paysan, rien que cinq paires! Il veut les essayer, le jour même, comme si demain il était trop tard. Un troisième vient de se marier. Il ne va quand même pas laisser tomber sa jeune épouse pour assister à un banquet. D'ailleurs ne sort-il pas déjà d'un repas de noces? Trois activités courantes dans un contexte agraire, et parfaitement légitimes. Mais ces activités sont brandies comme autant d'excuses pour ne pas venir. En fait, les convives ne veulent pas venir (Matthieu 23:37), et certains vont même jusqu'à outrager les serviteurs venus les inviter (Matthieu 22:6).

Le premier plaide la nécessité: "J'ai acheté un champ, et je suis obligé d'aller le voir". Il affirme donc ne pas pouvoir venir. Tant de gens le prétendent, quand on les invite à aller écouter l'Evangile. On notera cependant la politesse de cet homme: il demande au serviteur de l'excuser auprès de son maître. Il est des gens qui très poliment déclinent l'invitation au salut que Dieu leur adresse en Christ. Cela ne les intéresse pas.

Le deuxième s'apprêtait à aller essayer ses boeufs au moment où le serviteur l'invita au festin. Pas question de modifier son plan, de renoncer à quelque chose qu'on considère comme important. Quand on a programmé son dimanche en décidant de faire un tas de choses auxquelles il est hors de question de renoncer, parce qu'on y tient de trop, on ne trouve pas la petite heure nécessaire pour aller adorer le Seigneur et écouter son Evangile. Quand toute la semaine et toute l'année on court après ce qu'on considère comme intéressant, passionnant, essentiel et primordial, on ne trouve pas de place dans sa vie pour Dieu, le recueillement, la prière et la communion fraternelle. On n'en a pas le temps. Et pas question de déroger à ses habitudes! "Là où est ton trésor, là aussi sera ton coeur" (Matthieu 6:21).

Le troisième invité est carrément impoli. Il ne s'excuse pas et déclare simplement qu'il ne peut pas venir. Il n'a pas à s'excuser d'ailleurs, puisque sa situation l'empêche de répondre à l'invitation. Et pourtant, n'aurait-il pas pu venir une heure ou deux, avec sa femme, pour faire plaisir à son ami? Il semble que les excuses se fassent plus fragiles. Les hommes disposent de toute une panoplie de prétextes pour ne pas accepter l'invitation du Christ, et à les regarder de près, on constate qu'ils ne tiennent pas la route. En fait, s'ils ne viennent pas, ce n'est pas parce qu'ils ne pourraient pas venir, mais parce qu'ils ne le veulent pas.

Va promptement dans les places et dans les rues de la ville:

C'est toujours le même serviteur qui ne cesse de cavaler. Il invite, rend compte à son maître, puis repart en inviter d'autres. Dans le parallèle de Matthieu 22:1 ss., par contre, ils sont plusieurs à agir. Image parfaite des liens qui unissent les prophètes et les apôtres à Dieu dont ils sont les serviteurs.

Le maître de maison de fâche. Colère légitime de Dieu qui n'accepte pas qu'on méprise son invitation et qu'on piétine sa grâce, son pardon et son salut. S'il en est ainsi, tant pis pour les convives! Que son serviteur aille inviter tous ceux qu'il rencontrera sur les places et dans les rues de la ville. Qu'il aille ramasser les pauvres, les malheureux, les malades, les estropiés, les aveugles et les boiteux. Les laissés pour compte, ceux qui n'assistent jamais à un festin de noces, parce qu'on oublie toujours de les inviter. Ils symbolisent certainement les publicains, les prostituées et les gens de mauvaise vie, les parias rejetés par les interlocuteurs habituels du Christ qu'étaient les sadducéens, pharisiens et scribes, fiers de leurs avantages et privilèges religieux et moraux.

C'est l'image de la générosité infinie du maître. Tous ces gens viennent, heureux et reconnaissants. Mais il y a encore de la place. L'amour de Dieu est tel qu'il y a toujours de la place à sa table pour tous ceux qui veulent venir. Alors le maître demande à son serviteur de sortir cette fois-ci de la ville, d'aller en rase campagne et de ramasser tous ceux qui traînent le long des haies, les vagabonds qui n'ont pas droit de cité dans la ville. Allusion sans doute aux païens étrangers à l'alliance que Dieu avait conclue avec Israël.

Contrains-les d'entrer:

Il ne s'agit pas de la contrainte physique des persécuteurs et inquisiteurs, mais d'une invitation pressante motivée par l'amour. Ces vagabonds et S.D.F. ne se sentent pas dignes d'être invités. Ils n'osent pas venir. Il faut les convaincre que le roi les veut à sa table. Pécheurs et pas beaux, ils se sentent indignes de la grâce de Dieu. Alors il faut insister, pour surmonter leur réticence, se faire suppliant: "Nous vous en supplions au nom de Christ: Soyez réconciliés avec Dieu!" (2 Corinthiens 5:20). "Contrains-les d'entrer" signifie non pas: "Oblige-les à venir en recourant à la force", mais: "Aide-les à surmonter leur peur que l'invitation ne les concerne pas, qu'ils ne soient pas assez beaux pour manger à la table du roi".

Il ne faut pas qu'il y ait des places vides. La maison doit être remplie. Jésus a devant lui des pharisiens et des scribes qui rejettent son appel à la repentance et son invitation au salut. Mais les places qui leur étaient réservées ne resteront pas vides. D'autres viendront les occuper. D'autres seront heureux de s'y asseoir.

Aucun de ces hommes ne goûtera de mon souper:

C'est ce que les théologiens appellent la volonté conséquente de Dieu. Il veut le salut de tous les hommes et les y invite tous, mais il exclut de ce salut et condamne éternellement ceux qui ont méprisé son offre de grâce et persisté dans leur incrédulité.

 

Thèmes de réflexion:

 

Questions de révision et exercices:

 


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17-Septembre-2002, Rev. David Milette.