L'ISLAM, par Dr. Wilbert Kreiss - index  L'ISLAM, par Dr. Wilbert Kreiss - index


 

5) Comment les chrétiens peuvent-ils aller à la rencontre des musulmans ?

Christianisme et islam ont bien des points communs. Le Coran confère à Allah 99 noms, titres ou attributs différents, tous plus beaux les uns que les autres. Les chrétiens pourraient les utiliser pratiquement tous quand ils parlent de leur Dieu. Islam et christianisme emploient d'une façon générale un vocabulaire tout à fait semblable, des termes tels que Dieu, Créateur, loi, commandement, jugement, péché, grâce. L'un et l'autre évoquent le commencement et la fin de toutes choses, la création et le jugement. Selon les deux conceptions, l'homme ne vit qu'une fois. Il n'existe pas de karma, de cycle de réincarnation l'obligeant à revivre autant de fois que nécessaire pour parvenir à un degré de sainteté suffisant pour accéder au paradis. Oui, c'est indéniable, christianisme et islam ont des points communs. Mais on se rend rapidement compte que les mêmes mots recouvrent des réalités différentes. Allah ne ressemble que de très loin au Dieu de la Bible, surtout tel qu'il s'est révélé en Jésus-Christ, dans le Nouveau Testament. Ce que l'islam appelle péché (transgression extérieure de préceptes du Coran et surtout de rites tels que la prière, le jeûne ou les interdits alimentaires) est très différent de ce que la Bible entend par là. Le paradis promis aux musulmans est difficilement comparable à ce que la Bible enseigne à ce sujet. Et on pourrait rallonger la liste.

Ce qui est particulièrement choquant et inacceptable pour un musulman, c'est l'idée que Dieu a un Fils, que ce Fils est devenu homme et qu'il s'est sacrifié pour les hommes afin de les racheter et de leur procurer le salut. C'est là quelque chose de proprement incroyable aux oreilles d'un disciple d'Allah, un obstacle quasiment impossible à franchir. En plus, un obstacle parfaitement inutile. Le musulman ignore la notion de péché originel, de souillure radicale qui entache tout être humain. Quant au péché actuel, il est, beaucoup plus qu'une faute morale ou le mauvais fruit d'un c ur corrompu, la transgression d'un précepte rituel, le non-accomplissement ou l'accomplissement défectueux d'un rite prescrit par le Coran. Par exemple, le fait d'omettre l'une ou l'autre des prières journalières ou de ne pas respecter scrupuleusement le rituel prescrit pour cela, de ne pas jeûner pendant le ramadan ou de le faire en trichant, par exemple en mangeant ou en fumant en cachette. Le respect de la volonté d'Allah est essentiellement quelque chose d'extérieur et de visible, une affaire de conformité formelle. Le musulman est donc convaincu que l'homme peut accomplir de lui-même, moyennant quelques efforts, ce que Dieu lui demande de faire pour lui plaire. Il n'a donc pas besoin de rédemption. Partant de là, Dieu n'a pas besoin d'un Fils qui accepte de s'incarner et de mourir sur la croix pour assurer le salut de ses semblables. Aussi l'islam se dresse-t-il farouchement contre les doctrines les plus fondamentales du christianisme, contre ce qui distingue radicalement la religion de Jésus-Christ de toutes les autres religions du monde. Résultat : la divinité du Christ est niée catégoriquement et de façon répétée dans le Coran, et un autre homme est mort sur la croix à sa place !

Alors comment s'y prendre, si le dialogue s'avère d'emblée aussi difficile ? Peut-être en prenant comme point de départ la notion de jugement divin qui est aussi importante pour un musulman qu'elle l'est pour un chrétien. Plus précisément l'affirmation que ce jugement est inéluctable, car sur ce point précis il existe un terrain d'entente entre christianisme et islam.

Le musulman tout comme le chrétien se demande comment il pourra subsister dans le jugement de son Créateur, et il est évident que le christianisme peut lui procurer une joie, une paix et une certitude que ne lui enseigne pas la religion d'Allah. Le musulman connaît aussi la notion de sacrifice, d'immolation. Une fois par an, il égorge un mouton, le kurban, en souvenir du sacrifice d'Abraham. Il est vrai que, selon le Coran, cette immolation ne constitue pas en premier lieu un sacrifice d'expiation pour les péchés. Cependant bien des représentations populaires qui ont cours dans l'islam lui attribuent cette signification. C'est là peut-être que se situe le point névralgique permettant de faire passer le message de l'Evangile : il existe un agneau qui a porté les péchés du monde et s'est sacrifié pour son salut. Dieu lui-même a procédé pour nous à un sacrifice qui peut nous sauver au jour du jugement. Une fois que le musulman a réalisé l'immense amour qu'il a ainsi manifesté aux hommes, il finira peut-être, par la puissance du Saint-Esprit, par reconnaître et confesser que cet agneau est son propre Fils, donc Dieu lui- même. L'Ecriture Sainte enseigne que Dieu aime le monde entier, donc tous les hommes sans exception (Jean 3 :16). Donc aussi les païens. Il veut leur salut. Aussi Jésus-Christ a-t-il chargé ses apôtres et, à travers eux, son Eglise, d'enseigner l'Evangile au monde entier (Matthieu 28 :19.20 ; Marc 16 :15.16). L'Evangile de Jésus-Christ offre à tout croyant une certitude du pardon et du salut qu'aucun musulman ne peut trouver chez Allah, car elle se fonde sur l' uvre miséricordieuse que Dieu a accomplie en Jésus-Christ et non sur les efforts et la dignité de l'homme. Il lui offre aussi une paix et une espérance qui n'ont rien à voir avec le fatalisme et la résignation engendrés par l'islam. Voilà pour le dogme.

La Bible nous demande aussi d'aimer Dieu par-dessus toutes choses et notre prochain comme nous-mêmes (Matthieu 22 :37-39). C'est ce qui doit dicter la ligne de conduite des chrétiens à l'égard de tous les hommes et des musulmans en particulier. Il s'agit de leur annoncer l'Evangile du Christ, Fils de Dieu devenu homme pour le salut du monde, et de le faire avec amour. Aimer son prochain comme soi-même, c'est vouloir l'arracher à la damnation éternelle et partager avec lui les joies, le bonheur et le salut que l'on trouve auprès du Christ. Il s'agit donc de renoncer à leur égard à toute forme de condescendance émanant d'un sentiment de supériorité, à la xénophobie, l'intolérance, la méfiance, voire la haine, et de lutter contre un racisme latent qui ne demande qu'à se réveiller dès que l'occasion se présente. Nous devons témoigner aux musulmans de l'amour même là où ils montrent de l'hostilité ou se comportent en ennemis. L'amour de l'ennemi a sa place dans le témoignage qui leur est dû. Si nous attendons qu'ils nous aiment pour les aimer à notre tour, nous ne faisons pas plus que ce que le Coran leur prescrit : « Mohammed est l'envoyé de Dieu. Ses compagnons sont terribles pour les infidèles et tendres entre eux-mêmes » (XLVIII, 29). « O croyants, ne prenez point pour amis les juifs et les chrétiens ; ils sont les amis les uns des autres. Celui qui les prendra pour amis finira par leur ressembler, et Dieu ne sera point le guide des pervers » (V, 56).

Le Christ enseigne aux siens autre chose. Il leur demande d'aimer sans condition et sans calcul, d'aimer même leurs ennemis, de bénir ceux qui les maudissent et de prier pour ceux qui leur veulent du mal. Jésus-Christ n'a pas agi comme Mahomet. Il ne s'est pas précipité, assis sur un cheval à la tête d'une bande de tueurs, dans les villes et les villages de la Galilée et de la Judée en brandissant une épée pour immoler ceux qui ne voulaient pas de son message. C'est poussé par son seul amour pour les hommes et désireux de les sauver par son message de pardon, de grâce et de paix qu'il est allé de bourgade en bourgade proclamer l'Evangile, quitte à pleurer sur leurs habitants incroyants. C'est là l'exemple d'amour qu'il nous a laissé. Si nous aimons les musulmans et que nous nous appliquons à le leur montrer, et cela malgré les problèmes qu'ils peuvent poser à notre société ou nous poser à nous-mêmes, nous marchons sur les traces du Christ et pratiquons l'amour chrétien. C'est à cela qu'on reconnaîtra que nous sommes ses disciples (Matthieu 5 :43-48).

Il est très mal vu aujourd'hui, dans le monde chrétien, de vouloir évangéliser les juifs ou les musulmans. C'est, dit-on, faire preuve d'intolérance et de fanatisme religieux. Le mot d'ordre est le suivant : ne cherchons pas à les contredire ou à les détourner de leur religion, mais dialoguons avec eux. Réjouissons-nous de ce que nous avons en commun avec eux et acceptons les différences. Voilà un discours qui se veut généreux et bienveillant, mais qui revient à nier l'affirmation biblique qu'il n'y a de salut que dans la foi en Christ. C'est désobéir à l'ordre missionnaire qui a été donné à l'Eglise et laisser des gens dans l'ignorance, en les privant du seul message qui peut les libérer de leurs pratiques et rites serviles et leur donner la consolante assurance du salut en Christ. Les musulmans sincères et convaincus estiment que l'occident perd tous les repères du passé, renonce à des valeurs fondamentales et patauge en pleine décadence (criminalité, violence, disparition de l'autorité parentale et de l'obéissance qu'on doit à ses aînés et ses supérieurs, alcoolisme, drogues, libertinage sexuel, homosexualité, avortements). Ce constat décevant explique la méfiance que nos concitoyens leur inspirent et l'antipathie qu'ils éprouvent pour la civilisation occidentale. Du moins là où ils restent attachés à leur religion et fidèles à leurs convictions. Etant donné qu'ils ont du mal, de par leur culture, à faire la différence entre chrétiens pratiquants et chrétiens de nom, il faut leur montrer toujours à nouveau que la décadence morale qui caractérise notre société n'est absolument pas inscrite dans la religion chrétienne, mais procède de la désobéissance aux commandements divins et de l'impiété de gens qui ont depuis longtemps tourné le dos au christianisme.

Il faut montrer aussi aux musulmans ce qu'est le « péché devant Dieu », non pas la simple transgression d'un rite, prière ou jeûne, mais un mal profond. Dieu regarde au c ur et voit toutes les mauvaises pensées qui le souillent. Le péché est là, au fond de nous, avant de se manifester par des gestes et des comportements visibles. Voilà ce qui sépare l'homme de Dieu, la maladie dont il doit guérir, celle dont Dieu seul peut le guérir. Voilà pourquoi il a accepté que son Fils, devenu homme, meure à la place des hommes en subissant le châtiment mérité par eux et en expiant leurs fautes.

Etant donné que les musulmans ont une bien fausse image des chrétiens, image véhiculée à la fois par une certaine propagande islamique et par un christianisme qui n'a trop souvent de chrétien que le nom, ils ne peuvent être qu'impressionnés lorsqu'ils côtoient des chrétiens convaincus, sincères, profondément imprégnés de l'enseignement du Christ, dont la justice n'est pas simplement extérieure ni la piété une piété de rites et donc de façade, mais qui mènent une vie irréprochable et font preuve d'amour et de bonté quand ils confessent son nom et qu'ils s'efforcent de partager leur foi avec les autres. C'est pour les musulmans quelque chose de fondamentalement nouveau ! Il est primordial qu'ils puissent voir la différence entre une religion dictée par des préceptes et par la crainte du châtiment divin et une religion qui a pour mobiles la confiance en Dieu, la foi dans les promesses de l'Evangile, l'amour et la gratitude.

 


 <<   L'ISLAM, par Dr. Wilbert Kreiss - index   >>

 

 

3-Janvier-2003, Rev. David Milette.