PETITE DOGMATIQUE LUTHERIENNE, par Dr. Wilbert Kreiss - index  PETITE DOGMATIQUE LUTHERIENNE, par Dr. Wilbert Kreiss - index


 

LA CREATION, LES ANGES, LA PROVIDENCE, L'ALLIANCE

 

1. LA CREATION

La création du monde n'est pas révélée dans la Bible comme une explication philosophique ou scientifique de l'origine de l'univers, mais dans sa dimension religieuse. Dieu est à l'origine de toutes choses. Tout lui est soumis et tout a été conçu de manière à fournir à l'homme, couronnement de la création, un cadre de vie agréable.

La création est l'oeuvre de Dieu. Il est intéressant de noter que le verbe hébraïque traduit généralement par "créer" (Genèse 1:1.21.27; 5:1; Psaume 104:30; Esaïe 45:7.8.12; 54:16; 65:18) a toujours Dieu pour sujet. C'est Dieu qui au commencement créa les cieux et la terre (Genèse 1:1), qui "a mesuré les eaux dans le creux de sa main, pris les dimensions des cieux de sa paume et ramassé la poussière de la terre dans un tiers de mesure", pesant "les montagnes au crochet et les collines à la balance" (Esaïe 40:12). "C'est moi qui ai fait la terre, dit-il, et qui sur elle ai créé l'homme. C'est moi, ce sont mes mains qui ont déployé les cieux, et c'est moi qui ai disposé toute leur armée" (Esaïe 45:12).

La création du monde distingue Dieu des idoles qui ne savent rien faire de leurs mains (Psaume 96:5; 115:4-7; Esaïe 37:16; 44:6 ss.; Jérémie 10:11.12). Elle est à la fois l'oeuvre du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Généralement elle est attribuée au Père, mais la Bible enseigne que le Fils éternel de Dieu y a participé. "Il n'y a qu'un seul Dieu, le Père, de qui viennent toutes choses et pour qui nous sommes, et un seul Seigneur, Jésus-Christ, par qui sont toutes choses et par qui nous sommes" (1 Corinthiens 8:6). "Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu et la Parole était Dieu. Elle était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par elle et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle" (Jean 1:1-3). Cf. encore Colossiens 1:15-17 et Hébreux 1:10.11. Quant à l'Esprit de Dieu, il "se mouvait au-dessus des eaux" (Genèse 1:2), et Job confesse que c'est lui qui l'a créé et qui l'anime (Job 33:4).

La Bible enseigne également que le monde a été créé à partir de rien. Il a suffi que Dieu parle pour qu'existe ce qu'il voulait créer (Genèse 1:3.6.9.11.14.20). "Il dit, et la chose arrive. Il ordonne, et elle existe" (Psaume 33:9). Cf. encore Psaume 148:5; Romains 4:17; Hébreux 11:3.

Le récit de la Bible est très simple dans son énoncé. Il a trouvé cependant des interprétations diverses dues à une lecture critique de ce texte ou au fait qu'on a voulu concilier ses affirmations avec les données de la science. Certains y ont vu les restes d'un ancien mythe d'origine babylonienne épuré de son paganisme. D'autres estiment que Genèse 1 ne raconte pas la création première du monde, mais sa reconstitution après que la chute des anges l'eut entraîné dans le chaos (Genèse 1:2). D'autres encore ont soutenu que le monde n'avait pas été créé en six jours, mais que sa création fut révélée en six jours à Moïse. Certains, tout en procédant à une interprétation littérale du texte, ont affirmé que le mot "jour" ne désignait pas un jour sidéral marqué par l'alternance de soleil et d'obscurité, mais une longue période identifiable à une ère géologique. Il existe encore une autre explication qui connaît un certain succès dans les milieux évangéliques. Elle affirme que Genèse 1 est une oeuvre qui ne prétend pas décrire la création dans le détail, mais la présente dans un certain cadre littéraire. Jamais il ne pourra donc y avoir de contradiction entre le récit biblique et la science.

Enfin, il y a l'interprétation littérale qui laisse s'exprimer le texte et interprète littéralement chacun de ses mots et chacune de ses phrases. C'est sans doute celle qui lui rend le plus justice. Cependant, deux choses méritent d'être soulignées. Premièrement il ne s'agit pas d'un récit historique au sens technique du terme, étant donné que son auteur n'a pas été le témoin de la création, pas plus qu'un autre du reste. Ce texte décrit des choses que personne n'a vues. Il est peut-être permis pour cette raison de l'assimiler à une sorte de prophétie tournée vers un passé lointain, celui de l'origine de toutes choses. D'autre part, Genèse 1 ne veut pas être un récit scientifique de la création. L'univers de l'infiniment grand et de l'infiniment petit est d'une complexité telle que sa création ne peut pas faire l'objet d'une description détaillée et scientifiquement adéquate. Elle sera toujours un miracle inaccessible à l'esprit humain. Pour en parler, il a fallu que Dieu simplifie à l'extrême, sinon nous n'y aurions rien compris... Le chrétien salue donc dans Genèse 1 un texte par lequel il a plu à Dieu de dire aux hommes qu'il a créé le ciel et la terre et comment il l'a fait, tout en sachant que la réalité a été beaucoup plus complexe que la description qui en est faite.

L'évolutionnisme qui affirme que la sélection naturelle a produit une chaîne évolutive des êtres humains, que les espèces actuelles sont issues d'espèces antérieures et que l'homme, descendant avec les primates d'un ancêtre commun, représente le dernier stade dans l'évolution du monde animal, est une théorie communément admise qui est loin d'être prouvée et que des scientifiques de haut niveau rejettent catégoriquement. Il est important pour le chrétien de le savoir, pour ne pas souscrire à la tentation de concilier avec le récit biblique de la création ce qui n'est en fin de compte qu'une hypothèse, au demeurant peu plausible. Il n'a pas à démontrer que la Bible dit vrai, comme il n'a pas besoin de se laisser ébranler dans la foi par ce qu'il entend dire autour de lui et qu'on ne pourra sans doute jamais prouver.

Le récit de la Bible est un texte admirable qui affirme que Dieu était là avant toutes choses, qu'il a créé le ciel et la terre et tout ce qu'ils contiennent avec une aisance ahurissante, un sens du beau et une sagesse qui forcent l'adoration. Lui seul doit être vénéré. Le soleil, la lune et les astres n'ont pas de pouvoir occulte et ne sont pas régis par des divinités. Il est donc inutile de les craindre. Le Seigneur au contraire, qui a tout fait à merveille et donné à l'homme, pour preuve de son amour, un cadre de vie magnifique, attend ses louanges et veut être béni et glorifié.

Le récit biblique de la création nous dit aussi que la nature, oeuvre de Dieu, veut être respectée. Le Seigneur ne l'a pas donnée à l'homme, mais n'a fait que la mettre à sa disposition, non pour qu'il l'exploite indûment, mais pour qu'il la gère avec sagesse, sachant que tout abus se retournera contre lui, et qu'il partage les fruits de la terre. Partant de là, il existe ce qu'on peut appeler une écologie chrétienne.

Questions de révision et exercices:

 

2. LES ANGES

L'existence des anges, comme celle de Dieu, ne se démontre pas, et la Bible ne le fait pas. Par contre, elle l'affirme et les montre à l'action. La doctrine des anges est donc un article de foi.

Nous apprenons tout d'abord que les anges ont été créés par Dieu: "Louez-le, vous tous ses anges! Louez-le, vous toutes ses armées!... Qu'ils louent le nom de l'Eternel, car il a commandé, et ils ont été créés" (Psaume 142:2.5). Ils font partie des choses "invisibles", des "trônes", des "dignités", "dominations" et "autorités" créées par Dieu (Colossiens 1:16).

Nous apprenons par ailleurs que les anges sont des créatures spirituelles, qui n'ont pas de corps. La Bible les appelle des "esprits" (Matthieu 78:16; 12:45; Luc 7:21; 8:2). Les démons sont des "esprits méchants dans les lieux célestes" (Ephésiens 6:12). Quant aux bons anges, ils sont des "esprits au service de Dieu" (Hébreux 1:14).

Ils sont puissants. C'est pour cela qu'ils sont appelés trônes, dignités, dominations et autorités (Colossiens 1:16). Les bons anges mettent leur puissance au service de Dieu qu'ils adorent et des croyants qu'ils protègent, tandis que les mauvais l'utilisent au service du mal, pour détruire l'oeuvre du Seigneur.

Les anges sont très nombreux. La Bible parle d'armées célestes, de légions et de myriades (Deutéronome 32:2; Psaume 17; Psaume 68; Matthieu 26:53; Marc 5:9.15). Les bons anges portent des titres divers: anges, fils de Dieu (Job 1:6; 2:1; Psaume 29:1; 89:6), trônes, dignités, dominations, autorités, principautés (Ephésiens 1:21; 3:10; Colossiens 1:16; 2:10; 1 Pierre 3:22). Certains sont appelés des chérubins (Genèse 3:24; 2 Samuel 6:2; Psaume 18:11), d'autres des séraphins (Esaïe 6:2.6). Il est aussi question d'un archange (1 Thessaloniciens 4:16; Jude 9). Certains anges portent des noms, comme Gabriel (Daniel 8:16; 9:21; Luc 1:19.26) ou Michel (Daniel 10:13.21; Jude 9; Apocalypse 12:7). Il semble donc qu'iI y ait une sorte de hiérarchie angélique, dont nous ignorons cependant les structures.

Tous les anges ont bien sûr été créés bons (Genèse 1:31). Certains le sont restés, tandis que d'autres se sont révoltés contre Dieu et sont déchus. La Bible dit qu'ils n'ont pas "gardé leur dignité" et qu'ayant "abandonné leur propre demeure", ils sont "enchaînés éternellement par les ténèbres" (Jude 6).

Les bons anges louent Dieu jour et nuit (Job 38:7; Psaume 103:20; 148:2). Ils sont aussi au service des croyants: "Ne sont-ils pas tous des esprits au service de Dieu, envoyés pour exercer un ministère en faveur de ceux qui doivent hériter du salut?" (Hébreux 1:14). Ils se réjouissent chaque fois qu'un pécheur se repent (Luc 15:10), gardent, protègent et délivrent les croyants (Psaume 34:8; 91:11; Actes 5:17-20), en particulier les petits (Matthieu 18:10). Ils soutiennent les enfants de Dieu dans leur dernier combat et les conduisent auprès du Seigneur (Luc 16:22). A certaines époques de l'histoire du peuple de Dieu, notamment au temps des patriarches, puis quand le Christ vint sur terre, les anges étaient chargés de missions particulières, servaient d'intermédiaires entre Dieu et les croyants et annonçaient des événements importants. L'époque de la révélation divine étant révolue, ces fonctions extraordinaires ont cessé.

Les mauvais anges, nous l'avons vu, sont des esprits qui se sont révoltés contre Dieu (Jude 6; 2 Pierre 2:4) et s'acharnent à lutter contre lui. Satan, leur chef, est à l'origine de la chute. C'est lui qui tenta et détourna les hommes de Dieu, les faisant sombrer dans le péché et la mort. C'est lui qui voulut détourner le Christ du chemin de l'obéissance, pour l'empêcher de racheter les hommes. C'est lui encore qui "rôde comme un lion rugissant, cherchant qui il dévorera" (1 Pierre 5:8). La Bible l'appelle pour cette raison Apollyon, le destructeur (Apocalypse 9:11), et le diable, ce qui signifie l'accusateur (Apocalypse 12:10). Il n'a qu'un désir: anéantir l'oeuvre de Dieu, l'empêcher de sauver les hommes, tenter les croyants pour les faire déchoir, les accuser pour obtenir leur condamnation. Mais le Fils de Dieu a paru afin de détruire les oeuvres du diable" (1 Jean 3:8). C'est par la foi en lui que les croyants le vaincront, à condition de veiller et de vaquer à la prière.

On parle peu des anges, de nos jours. C'est sans doute dû au rationalisme ambiant dans lequel vivent les chrétiens et qui nie l'existence d'un monde invisible. Et pourtant, notre époque, qui se veut si clairvoyante et si sobre dans ses croyances, connaît un réveil des pratiques occultes, un regain du surnaturel. Les pratiques divinatoires, le spiritisme, les phénomènes parapsychologiques, les cultes étranges y compris sataniques connaissent un regain de faveur. Au nom de la raison on croit devoir dire non à toute forme de religion révélée, mais on est capable tout à la fois de faire preuve d'une terrible crédulité et de s'adonner aux pratiques les plus insolites et les plus irrationnelles.

Quelqu'un a dit un jour qu'on ne peut pas rendre de meilleur service au diable qu'en ne parlant pas de lui. C'est justement face à ces pratiques occultes et dangereuses que l'Eglise doit rappeler ce que l'Ecriture dit des anges, bons et mauvais. Les chrétiens ont le droit de se savoir entourés d'anges et de s'en réjouir, comme il leur faut prendre au sérieux les avertissements de la Parole de Dieu concernant Satan et les démons.

Questions de révision et exercices:

 

3. LA PROVIDENCE

La providence est le gouvernement du monde exercé par Dieu. En effet, le Seigneur qui a créé l'univers maintient et dirige toutes choses. C'est une doctrine riche en consolation. Le croyant ne se sait pas seulement une créature de Dieu, mais il sait aussi que le Seigneur tient toutes choses dans ses mains, qu'il le protège et qu'il gouverne le monde de manière à accomplir son plan de salut.

L'épicurisme ancien prétendait que le monde était gouverné par le hasard, le stoïcisme le disait régi par le destin. Le christianisme confesse qu'il l'est par Dieu. Le déisme soutient qu'en créant le monde, Dieu lui a imprimé des propriétés et des lois par lesquelles il est régi, puis qu'il s'est retiré, le livrant à lui-même. C'est une fausse doctrine, car elle trace un fossé entre le monde et Dieu et ignore que le Seigneur agit en personne dans l'univers qui est son oeuvre. Quant au panthéisme, il confond Dieu et le monde, faisant du monde une émanation de Dieu et déclarant les deux indissociables. C'est ignorer que le monde en tant que création est distinct de Dieu. La Bible enseigne que Dieu s'occupe de sa création tout en restant distinct d'elle. Il est présent en elle et la fait vivre.

Les objets de la providence divine:

Qui est objet de la providence divine? Qui est concerné par elle? L'univers tout entier, puisque "l'Eternel a son trône dans les cieux et son règne domine sur toutes choses" (Psaume 103:19) et qu'il est celui "qui opère toutes choses d'après le conseil de sa volonté" (Ephésiens 1:11). Le livre de Job décrit cette providence de manière admirable: "Dieu tonne de sa voix d'une manière merveilleuse; il fait de grandes choses que nous ne comprenons pas. Il dit à la neige: Tombe sur la terre! Il le dit à la pluie, même aux plus fortes pluies. Il met un sceau sur la main de tous les hommes, afin que tous se reconnaissent comme ses créatures. L'animal sauvage se retire dans une caverne et se couche dans sa tanière. L'ouragan vient du midi, et le froid des vents du nord. Par son souffle Dieu produit la glace, il réduit l'espace où se répandaient les eaux. Il charge de vapeurs les nuages, il les disperse étincelants" (Job 37:5-10). C'est lui qui "fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons" et qui fait "pleuvoir sur les justes et sur les injustes" (Matthieu 5:45), qui fait germer les plantes et donne ainsi à manger au bétail et aux hommes (Psaume 104:14.21.28). Pas un seul oiseau ne tombe à terre sans sa volonté (Matthieu 10:29). Il gouverne les nations, les fait naître et les anéantit (Psaume 66:7; Job 12:23; Actes 17:26).

Il préside aussi à la destinée de chaque individu. Et cela dès le sein de sa mère: "Quand je n'étais qu'une masse informe, tes yeux me voyaient, et sur ton livre étaient tous inscrits les jours qui m'étaient destinés, avant qu'aucun d'eux existât" (Psaume 139:16; Jérémie 1:5; Galates 1:15.). Il élève l'un et abaisse l'autre (Psaume 75:6-8), renverse les puissants de leurs trônes et secourt les humbles (Luc 1:52). Même les événements apparemment accidentels et insignifiants de la vie sont entre ses mains, au point que les cheveux de notre tête sont tous comptés (Matthieu 10:30; Proverbes 16:33). Aussi Dieu protège-t-il les justes: "Le secours me vient de l'Eternel qui a fait les cieux et la terre. Il ne permettra pas que ton pied chancelle. Celui qui te garde ne sommeillera point" (Psaume 121:2.3; 4:8; 63:8). Il pourvoit aux besoins des siens (Genèse 22:8.14; Philippiens 4:19) et exauce leurs prières: "Demandez et l'on vous donnera! Cherchez et vous trouverez! Frappez et l'on vous ouvrira! Car quiconque demande reçoit, celui qui cherche trouve, et l'on ouvre à celui qui frappe" (Matthieu 7:7; Psaume 65:2.3; Luc 18:7.8). Quant aux impies, le Seigneur les châtie en son temps, au plus tard au jour du jugement (Psaume 7:12.13; 11:6).

De quoi est faite la providence divine?

Dire que Dieu gouverne le monde, c'est affirmer tout d'abord qu'il le préserve, qu'il le maintient en existence, qu'il garde et protège ses créatures. On appelle cela la préservation. "Il soutient toutes choses par sa parole puissante" (Hébreux 1:3). Tout subsiste en lui en qui nous avons "la vie, le mouvement et l'être" (Colossiens 1:17; Actes 17:28). "Il gardera les pas de ses bien-aimés" (1 Samuel 2:9). "Si l'Eternel ne bâtit la maison, ceux qui la bâtissent travaillent en vain. Si l'Eternel ne garde la ville, celui qui la garde veille en vain" (Psaume 127:1). Cf. encore Genèse 28:15; Exode 14:30; Psaume 31:20.21; 107:9; 145:14.15. Aussi l'homme est-il encouragé et invité à l'invoquer avec confiance. Le Seigneur prendra soin de lui (Psaume 32:6; 1 Pierre 3:12).

Pour gouverner le monde, Dieu se sert généralement de causes secondes, des lois qui régissent l'univers et des moyens divers qu'il utilise pour accomplir sa volonté. Il y a ainsi coopération entre Dieu et les instruments choisis par lui. Il s'est servi de Joseph vendu par ses frères pour sauver la vie à sa famille et secourir "un peuple nombreux" (Genèse 45:5; 50:19.20). Il utilise les aliments qu'il fait pousser pour nourrir ses créatures, le savoir du médecin et la vertu des médicaments pour guérir les malades. Il se sert des rois et des grands de ce monde (Proverbes 21:1), donne la victoire à son peuple (Josué 11:6) ou utilise l'armée assyrienne pour le châtier (Esaïe 10:5-7). Il s'est servi de Judas pour livrer Jésus-Christ entre les mains des Juifs et de Ponce Pilate pour le faire mourir sur la croix (Actes 2:22.23.36). Ainsi, toutes les bonnes choses de ce monde sont des bénédictions du Seigneur et aucun mal ne se fait sans sa volonté. On appelle gouvernement l'activité par laquelle il dirige toutes choses de manière à réaliser ses desseins et accomplir sa volonté. La providence a en effet une finalité: elle doit glorifier son nom et sauver son peuple. Le jour vient où tout genou fléchira dans les cieux, sur la terre et sous la terre et où toute langue confessera que Jésus est Seigneur à la gloire de Dieu le Père (Philippiens 2:10.11).

La providence divine soulève de graves problèmes qui ont de tout temps intrigué, voire tourmenté les hommes. Pourquoi, si Dieu tient tout dans ses mains, y a-t-il tant de mal et de méchanceté dans ce monde? Pourquoi les méchants sont-ils épargnés et les justes souffrent-ils? Dieu veut-il vraiment les guerres, la cruauté et la violence, les catastrophes et les famines? Et s'il ne les veut pas, pourquoi ne les empêche-t-il pas?

Ce sont des questions douloureuses, auxquelles nous ne pouvons donner que des éléments de réponses. En effet, il ne nous a pas révélé tous ses desseins, et même s'il l'avait fait, nous serions trop petits pour comprendre tout ce qu'il fait. Voici ce qu'on peut dire en se fondant sur l'Ecriture Sainte:

Providence et miracles:

Dieu, nous l'avons vu, gouverne le monde en recourant aux causes secondes. Il utilise les lois qu'il a établies et mises en place. Mais il lui arrive aussi de permettre que des choses se réalisent sans que nous puissions les expliquer par les lois de la nature. On dit alors qu'il fait des miracles. C'est ainsi que Jésus a guéri des malades et ressuscité des morts en prononçant simplement un mot. Le rationalisme et les théologiens libéraux ont voulu montrer que ce n'étaient pas de vrais miracles, mais que ces choses pouvaient s'expliquer. Ou bien ils ont affirmé que certains textes de la Bible racontaient réellement des miracles, parce que les gens de l'époque croyaient en la réalité de prodiges, mais qu'ils étaient en cela tributaires de leur époque, qu'il fallait les démystifier. Ces récits, dit-on, sont influencés par la manière de penser de l'époque. Ce qui signifie que nous ne sommes pas tenus de croire en l'inspiration et l'inerrance de la Bible, quand elle relate des miracles.

Ce qui rend la foi aux miracles difficile, c'est le fait qu'ils semblent contraires aux lois de la nature lesquelles sont pour nous intangibles. La théologie répond à cela que le Seigneur n'est pas lié aux lois qu'il a mises en place. En fait, quand il accomplit des miracles, il n'agit pas contre les lois de la nature, mais sans elles. Les miracles sont au-dessus de la nature et la transcendent. Il n'y a pas violation des lois naturelles, comme si Dieu refusait de faire ce qu'il serait tenu de faire, mais activité divine sans recours à elles pour une manifestation supérieure de sa volonté.

Les miracles racontés par la Bible obéissent à une finalité. Ils ont leur raison d'être. Ce ne sont pas de simples exhibitions de pouvoir. La chute dans le péché et la volonté de salut de Dieu les rendent parfois nécessaires. Ils sont signes de puissance, mais aussi de bonté, signes de la rédemption, préfigurations et symboles de la délivrance finale. Aussi est-ce manifestement à certaines époques précises qu'il a plu à Dieu de recourir à eux pour réaliser son plan.

Questions de révision et exercices:

 

4. L'ALLIANCE

La notion d'alliance est courante chez les hommes, sous toutes les latitudes, à toutes les époques et dans toutes les civilisations. Tout homme sait de quoi il s'agit. C'est un pacte conclu entre plusieurs partenaires où chacun prend des engagements auxquels il est lié. Dieu s'est donc servi de ce concept pour révéler son plan de salut. L'alliance est ainsi une donnée fondamentale de la révélation biblique. A la différence des alliances que contractent des individus ou des nations, celle que Dieu conclut avec les croyants est, sinon à sens unique, du moins telle que Dieu est celui qui prend l'initiative du contrat, formule des promesses aux termes desquelles il s'engage à déverser toutes ses bénédictions sur ceux auxquels il se lie et à les sauver. Il attend d'eux, en retour, qu'ils se consacrent entièrement à lui, fassent sa volonté et le servent d'un coeur sincère.

L'alliance de grâce:

L'alliance de Dieu est une alliance unique qui a pour fondement la grâce. Elle se résume dans l'affirmation que le Seigneur du ciel et de la terre devient le Dieu personnel de celui auquel il se lie: "Ce sera une alliance perpétuelle en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de ta postérité après toi" (Genèse 17:7). Elle fut révélée pour la première fois au moment de la chute, quand Dieu s'engagea à accorder aux hommes la victoire sur les forces du mal: "Je mettrai inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité. Celle-ci t'écrasera la tête et tu lui blesseras le talon" (Genèse 3:15). Au lendemain du déluge, il promit de ne plus châtier l'humanité par un cataclysme de ce genre (Genèse 8:21.22).

Les choses se précisèrent, quand Dieu choisit Abraham pour en faire l'ancêtre de son peuple. Il lui promit de faire de lui, qui n'avait pas encore de fils, un grand peuple. La promesse se fit de plus en plus précise, jusqu'à ce qu'il lui annonçât qu'en sa postérité seraient un jour bénies toutes les nations de la terre (Genèse 12:1-3; 13:14-16; 15:4-6). Aux termes de cette alliance, le Seigneur promit au patriarche qu'il donnerait à sa postérité le pays de Canaan où lui-même ne possédait qu'un lopin de terre (Genèse 15:18-21). L'alliance fut scellée par un signe, la circoncision (Genèse 17:9-12). Nous avons dans ces textes la première annonce de la venue du Messie. En effet, la postérité dans laquelle toutes les nations de la terre allaient être bénies n'était pas seulement le peuple d'Israël, source de bénédictions pour les païens, mais le Christ, postérité d'Abraham par excellence (Galates 3:16) et auteur du salut pour tous les hommes.

Quand au bout de nombreuses années de servitude en Egypte, Yahvé décida de délivrer son peuple et de le faire entrer dans le pays promis, il renouvela en faveur d'Israël l'alliance qu'il avait conclue avec son ancêtre: "Si vous écoutez ma voix et si vous gardez mon alliance, vous m'appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à moi. Vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation sainte" (Exode 19:5.6). Il promit de les protéger, de ne pas les abandonner, mais de toujours se souvenir de son alliance (Lévitique 26:44), promulgua une charte, les dix Commandements, et leur demanda en échange l'obéissance et la sainteté, gages de leur fidélité.

Par la suite, il choisit David, l'établit sur le trône d'Israël, lui promit non seulement un descendant direct, mais aussi un Fils en qui sa royauté deviendrait éternelle (2 Samuel 7:11-16). Ce Fils est Jésus-Christ, né d'une vierge issue de la lignée de David et légalement adopté par Joseph, lui aussi descendant du grand roi. L'ange annonça à Marie: "Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut, et le Seigneur lui donnera le trône de David, son père. Il régnera sur la maison de Jacob éternellement, et son règne n'aura point de fin" (Luc 1:32.33).

C'est donc en Jésus-Christ que s'est accomplie la promesse faite aux pères. Le Fils de Dieu devint homme, quand les temps furent accomplis, un véritable Juif qui est devenu par sa vie sainte et juste, sa mort rédemptrice et sa résurrection victorieuse, source de bénédictions et de salut pour les hommes du monde entier. Il n'existe donc qu'une alliance, qui est toujours alliance de grâce et qui a pour fondement le Messie promis et venu en son temps.

Alliance ancienne et alliance nouvelle:

Il arrive que la Bible parle d'une "alliance nouvelle" (Jérémie 31:31), de la "nouvelle alliance" dans le sang du Christ (Luc 22:20; Hébreux 12:24). C'est, bien sûr, par opposition à l'alliance dont avaient parlé les prophètes. En réalité, c'est toujours la même alliance, mais dans une dispensation et un régime nouveau. Fondamentalement elle est restée la même, mais il n'y a plus de circoncision, de sabbat, de sacrifices, de distinction entre aliments purs et impurs, de fêtes et de rites prescrits par la loi. Aussi les croyants de l'ancienne alliance ont-ils été sauvés de la même façon que ceux de l'alliance nouvelle (Actes 10:43). La Loi et les prophètes ont annoncé le même Christ que l'Evangile (Romains 3:21.22), celui qu'Abraham a salué de loin (Jean 8:56). Quant aux païens convertis à lui, ils sont par la foi postérité d'Abraham (Galates 3:29). Tout était préfiguration dans l'Ancien Testament, "ombre des choses à venir" (Colossiens 2:16.17). Jésus est venu tout accomplir. C'est pourquoi le culte avec ses sacrifices, ses rites et toutes les lois qui le régissaient n'avait plus de raison d'être. Il avait joué son rôle. Désormais il n'était plus lié à Jérusalem, car on allait adorer Dieu en esprit et en vérité (Jean 4:21-24). C'est la dispensation nouvelle et dernière de l'ancienne alliance. Dieu en effet n'abroge pas ce qu'il a décrété, ne renie ou ne modifie pas ses promesses.

Sacrifices et sacrements:

Moïse avait, à la demande de Dieu, institué dans l'ancienne alliance un certain nombre de sacrifices qui devaient préfigurer celui du Christ. Il y avait tout d'abord l'holocauste journalier (Lévitique 1). Comme son nom l'indique, l'animal était, après qu'on eut recueilli son sang pour en asperger l'autel, entièrement brûlé, geste qui exprimait la consécration totale de la victime à Dieu, image du Christ qui s'est entièrement consumé dans l'accomplissement de sa mission, et du croyant prêt à le suivre dans cet acte de consécration et d'abandon obéissant.

Il y avait ensuite les sacrifices d'expiation (Lévitique 4) et les sacrifices de culpabilité (Lévitique 5). Dans les deux cas on immolait un taureau, un bouc, une chèvre ou tout simplement une tourterelle ou un pigeon. Une partie du sang était répandue devant Dieu et sur les cornes de l'autel des parfums, et le reste versé au pied de l'autel des holocaustes pour expier les péchés du sacrificateur et du peuple. Le sacrifice d'expiation visait les fautes commises envers Dieu, le sacrifice de culpabilité celles qui affectaient le prochain.

Les sacrifices d'actions de grâces (Lévitique 3) étaient apportés en reconnaissance de bénédictions inattendues, pour s'acquitter d'un voeu ou tout simplement exprimer à Dieu son amour, sa reconnaissance et son adoration. Les victimes étaient les mêmes que pour les sacrifices précédents, à l'exception des oiseaux. Leur sang était répandu, leur graisse brûlée sur l'autel, tandis que la poitrine et l'épaule étaient données aux sacrificateurs et le reste consommé par l'offrant et sa famille.

Dans tous ces sacrifices, les gestes étaient les mêmes:

L'Ecriture enseigne clairement que ces sacrifices n'avaient pas en eux-mêmes le pouvoir d'expier les péchés du peuple. En cela ils différaient radicalement des sacrifices des païens. L'épître aux Hébreux est formelle à ce sujet. Elle affirme qu'ils "ne pouvaient pas rendre parfait sous le rapport de la conscience" celui qui les apportait, qu'ils avaient donc un caractère provisoire (Hébreux 9:9.10), que le sang des taureaux et des boucs procurait la pureté de la chair et non celle du coeur, qu'il purifiait donc rituellement (Hébreux 9:13), que ces immolations ne pouvaient en fait "ôter les péchés" (Hébreux 10:11). Il fallait pour cela un sacrifice supérieur et parfait, celui du Christ (Hébreux 9:14) dont toutes ces oblations n'étaient que "l'ombre des biens à venir" (Hébreux 10:1). Dans l'ancienne comme dans la nouvelle alliance, c'est la foi en les promesses de grâce de Dieu et donc en Jésus-Christ qui procure le pardon et purifie les coeurs. Aussi ces sacrifices n'apportaient-ils le pardon et n'apaisaient-ils la conscience que s'ils avaient lieu dans la foi en le Messie promis.

Dieu avait institué pour Israël des signes de son alliance. C'était tout d'abord la circoncision, "signe d'alliance entre moi et vous " (Genèse 17:11), selon l'apôtre Paul le "sceau de la justice" qu'Abraham avait obtenue par la foi quand il était incirconcis (Romains 4:11). Elle était pour lui le signe visible que Dieu l'avait justifié par la foi en ses promesses. Ce n'était pas seulement un signe de reconnaissance ethnique, car elle existait dans tout le Moyen Orient de l'époque. En la prescrivant à Abraham et à ses descendants, Dieu lui avait donné un contenu nouveau. Elle devait attester à tous ceux sur qui elle était pratiquée qu'ils faisaient partie de son peuple, qu'ils étaient donc au bénéfice des promesses de l'alliance.

En même temps, la circoncision était le signe visible d'une circoncision invisible, intérieure, "d'une circoncision que la main n'a pas faite, mais de la circoncision de Christ" qui consiste dans la repentance et le renoncement à la chair (Colossiens 2:11). On peut donc, comme c'est le cas des Juifs incroyants, être circoncis dans la chair, sans l'être dans le coeur, et inversement l'être dans le coeur sans l'être dans la chair, comme le sont les païens qui se sont convertis à Dieu (Romains 2:28.29; Philippiens 2:2.3).

La circoncision annonçait ainsi le Baptême, porteur du pardon et du salut et signe de l'alliance conclue par Dieu. Reçu dans la foi, ce sacrement est le gage de la circoncision du coeur qui n'est pas faite par la main de l'homme, mais l'oeuvre de Dieu. Il atteste donc que le croyant a été enseveli avec le Christ en sa mort pour vivre avec lui d'une vie nouvelle (Colossiens 2:11-13).

Dieu avait institué aussi le rituel de l'agneau pascal, ainsi appelé parce que les Hébreux mangèrent, la nuit de l'Exode, un agneau apprêté avec des herbes amères, souvenir des souffrances qu'ils avaient connues en Egypte (Exode 12:1-18). Une première célébration de la Pâque eut lieu au désert (Nombres 9:1-5), puis elle devint une fête annuelle, rappelant la délivrance miséricordieuse que Yahvé avait accordée à son peuple, ainsi que le début de la moisson. Elle préfigurait en même temps la Sainte Cène, le repas que le Christ institua la veille de sa mort pour la commémorer et célébrer ainsi la rédemption offerte. C'est manifestement la raison pour laquelle Jésus-Christ l'institua au moment où il mangeait avec les disciples l'agneau pascal et quelques heures avant de mourir. Ainsi l'Exode, commémoré par la Pâque, est la préfiguration de la grande délivrance que le Messie est venu apporter aux siens et qu'ils célèbrent dans l'action de grâces en communiant à son corps et à son sang.

Questions de révision et exercices:

 


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3-Oct-2002, Rev. David Milette.