PETITE DOGMATIQUE LUTHERIENNE, par Dr. Wilbert Kreiss - index  PETITE DOGMATIQUE LUTHERIENNE, par Dr. Wilbert Kreiss - index


 

DOCTRINE DE L'HOMME

L'homme est une créature de Dieu, une créature à l'origine parfaite comme tout ce que fait le Seigneur. De plus, il fut créé à l'image de Dieu et représentait ainsi le point culminant de son oeuvre. Nous rejetons comme contraire au clair enseignement de la Bible l'affirmation selon laquelle l'homme serait issu par évolution du monde animal et aurait avec les singes un ancêtre commun. La Bible affirme qu'il fut l'objet d'un acte créateur tout à fait particulier, que Dieu "forma l'homme de la poussière de la terre et souffla dans ses narines un souffle de vie" (Genèse 2:7). Tout en concédant volontiers que ce texte décrit un acte créateur dont les modalités nous seront toujours mystérieuses, nous affirmons que c'est de cette façon, donc par un acte spécial, qu'il a plu à Dieu de créer l'homme, et rien ne nous autorise à croire que cette "poussière" aurait été un animal ou un pré-adamite. Puis la Bible précise que la femme fut tirée de l'homme. Ainsi apparut sur terre le premier couple humain.

Il s'ensuit que l'humanité tout entière descend du premier couple, ce qui fait dire à l'apôtre Paul: "Dieu a fait que tous les hommes, sortis d'un seul sang, habitent sur toute la surface de la terre, ayant déterminé la durée des temps et les bornes de leur demeure" (Actes 17:26). Tous les hommes sont donc solidaires les uns des autres, dans la condamnation comme dans la rédemption. Tous ont péché dans le premier Adam et tous revivront dans le deuxième Adam qu'est le Christ. De même que le péché d'Adam a été imputé à tous les hommes, la justice du Christ est là, prête à être imputée à tous les hommes, et effectivement imputée à tous ceux qui croient.

 

1. LA CONSTITUTION DE L'HOMME

On affirme communément que l'homme possède une âme et un corps. La philosophie grecque faisait un pas de plus en opposant l'âme au corps. Elle enseignait que le corps étant matière, est quelque chose de mauvais qu'il faut savoir mépriser, et qu'il constitue une prison pour l'âme. Celle-ci est immatérielle et donc bonne par nature, et son vrai bonheur consiste à être libérée du corps. D'où la doctrine de la métempsycose ou migration des âmes qui est professée par la plupart des religions orientales, selon laquelle l'âme d'un homme quitte son corps au moment de la mort, pour entrer dans un autre corps (animal ou humain). S'il s'est efforcé de rechercher le bien, sa vie sera dans cette existence nouvelle meilleure que ce qu'elle a été, jusqu'au jour où, ayant atteint la perfection, son âme sortira de ce cycle de réincarnations pour être enfin libre.

La Bible affirme elle aussi que l'homme a une âme et un corps ou plutôt qu'il est âme et corps, mais n'oppose pas les deux comme des éléments contraires. Ame et corps ont les mêmes besoins et les mêmes aspirations: "O Dieu! tu es mon Dieu, je te cherche. Mon âme a soif de toi, mon corps soupire après toi, dans une terre aride, desséchée, sans eau" (Psaume 63:2). "Mon âme soupire et languit après les parvis de l'Eternel. Mon coeur et ma chair poussent des cris vers le Dieu vivant" (Psaume 84:3). Le corps n'est pas mauvais parce qu'il est matière, et l'âme n'est pas bonne sous prétexte qu'elle est immatérielle. Dieu a créé l'homme bon, dans son corps et dans son âme, et s'il est mauvais depuis la chute, il l'est dans les deux à la fois. On dit que l'enseignement de l'Ecriture Sainte est moniste, par opposition au dualisme de la philosophie grecque et des religions orientales.

L'homme peut tuer son prochain physiquement, mais n'a pas de pouvoir sur sa vie intérieure et sa destinée éternelle. Jésus disait: "Ne craignez pas ceux qui tuent le corps et qui ne peuvent tuer l'âme. Craignez plutôt celui qui peut faire périr l'âme et le corps dans la géhenne" (Matthieu 10:28). De quelqu'un de vivant on dit que son âme est en lui, d'un mourant qu'il rend l'âme, et d'un ressuscité que son âme est revenue en lui (Genèse 35:18; 1 Rois 17:21.22; Jérémie 15:9; Matthieu 27:50; Actes 7:59; 20:10; Apocalypse 6:9).

On dit aussi que l'enseignement de la Bible est dichotomiste, ce qui signifie que l'homme est fait de deux éléments, qu'il a une âme et un corps. Quand il lui arrive de distinguer entre l'âme et l'esprit d'un homme, elle n'en fait donc pas deux éléments distincts. Dans la phrase de Marie: "Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit se réjouit en mon Dieu" (Luc 1:46.47), les deux propositions sont sans doute synonymes. Ce sont alors deux façons différentes de dire la même chose. Ame et esprit semblent être des termes interchangeables. Rendre l'âme est la même chose que rendre l'esprit (Genèse 35:18; Jérémie 15:9; Matthieu 27:50; Actes 7:59).

D'où vient l'âme de l'homme? Cette question a reçu deux réponses différentes. Certains Pères de l'Eglise disaient que Dieu implante une âme à chaque foetus, dans le ventre de sa mère (créationnisme). D'autres au contraire soutenaient que l'âme de l'homme est unie à son corps dès le moment de la conception, que les parents transmettent l'une et l'autre à leurs enfants (tradutianisme). Il existe des arguments pour et contre l'une ou l'autre de ces explications. C'est le genre de question qui ne trouve pas de réponse dans la Bible et où on ne peut pas trancher. L'Eglise luthérienne a cependant une préférence pour le tradutianisme qui lui paraît plus compatible avec la doctrine du péché originel.

L'Ecriture Sainte emploie souvent le mot "chair". Celui-ci désigne très rarement la viande animale ou humaine (Genèse 2:21; 17:11 ss.; 41:2.3; Lévitique 12:3; Esaïe 44:16; Ezéchiel 4:14). Appliqué à l'homme, il le décrit d'une façon générale comme un être pécheur, faible, passager et mortel. Ainsi, dans ce texte bien connu: "Toute chair est comme l'herbe, et tout son éclat comme la fleur des champs. L'herbe sèche, la fleur tombe, quand le vent de l'Eternel souffle dessus. Certainement le peuple est comme l'herbe. L'herbe sèche, la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu subsiste éternellement" (Esaïe 40:6.7).

 

2. L'HOMME AVANT LA CHUTE

La Bible enseigne que l'homme a été créé à l'image de Dieu: "Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance. Dieu créa l'homme à son image, il le créa à l'image de Dieu" (Genèse 1:26.27; 5:1). Les deux mots "image" et "ressemblance" sont sans doute des synonymes.

De quoi s'agit-il? Il est évident qu'il n'est pas question d'une ressemblance corporelle, Dieu n'ayant pas de corps. On peut songer, bien sûr, à tout ce qui distingue l'homme de l'animal et le rapproche de Dieu, le fait notamment qu'il est un être rationnel, intelligent, capable de réfléchir, doué de mémoire, qui possède le sens du beau et sait distinguer entre le bien et le mal, autant de capacités qui font que Dieu lui confia la domination sur la nature. Cependant la Bible va plus loin et propose une définition plus précise. Elle demande en effet aux croyants de se "dépouiller du vieil homme" et de "revêtir l'homme nouveau", et dit de cet homme nouveau qu'il est "créé selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité" (Ephésiens 4:21), qu'il se "renouvelle dans la connaissance selon l'image de celui qui la créé" (Colossiens 3:9.10). Dans l'épître aux Romains, l'apôtre Paul dit de ceux que Dieu a connus d'avance qu'il "les a aussi prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né de plusieurs frères" (Romains 8:29). Les chrétiens sont destinés à être, partiellement maintenant et tout à fait dans le ciel, semblables à Jésus-Christ leur Seigneur, saints et justes comme lui. Pierre va jusqu'à dire qu'ils deviennent par la foi "participants de la nature divine" (2 Pierre 1:4). Si nous retenons cette définition, nous dirons que l'image de Dieu réside non seulement dans les aptitudes mentales et émotionnelles, mais aussi dans la sainteté, la justice et la connaissance. C'est en cela que l'homme ressemblait à Dieu et qu'il ne lui ressemble plus... Cette image-là, il l'a perdue par la chute. Les deux textes que nous venons de citer exhortent les croyants à progresser dans la connaissance, la sainteté et la justice. C'est ainsi qu'ils ressemblent de nouveau à Dieu. Mais d'une façon bien imparfaite, car le péché est toujours en eux. Ce n'est que dans le ciel qu'ils seront entièrement justes et saints et qu'ils connaîtront le Seigneur de façon parfaite.

Questions de révision et exercices:

 

3. L'HOMME DEPUIS LA CHUTE

L'humanité est aux prises avec le péché, en tout temps et en tout lieu. C'est quelque chose que personne ne peut nier. Il suffit de lire les journaux, d'allumer la télévision ou tout simplement d'ouvrir les yeux et de regarder autour de soi et... en soi. Et il en a toujours été ainsi.

Le péché:

Il existe dans la Bible toute une série de mots hébreux et grecs que les traductions françaises rendent tour à tour par les termes "péché", "injustice", "transgression", "iniquité", "rébellion", "faute", "erreur", etc. Chacun d'eux a sa nuance propre. Ce sont autant de façons différentes de dire que la vie de l'homme n'est pas conforme à ce que Dieu exige dans sa Loi. Alors il existe, comme nous aurons l'occasion de le voir, bien des différences d'un péché à l'autre, mais ils ont tous, petits et grands, connus ou secrets, ceci de commun qu'ils sont autant de transgressions de la Loi divine: "Quiconque pèche transgresse la Loi, et le péché est la transgression de la Loi" (1 Jean 3:4). Pécher, c'est transgresser la Loi ou encore "commettre l'iniquité" (Matthieu 7:23). Cette Loi est révélée dans l'Ecriture Sainte, mais aussi inscrite dans la conscience de chaque homme. C'est pourquoi il n'est pas nécessaire d'avoir lu la Bible pour la transgresser. Aussi tous sont-ils "sous l'empire du péché" (Romains 3:9), juifs et païens, et tout est-il "renfermé sous le péché" (Galates 3:22).

Dieu est saint et pur. Il exige donc de l'homme qu'il soit lui aussi saint et pur, dans ses pensées, ses paroles et ses actes. C'est pourquoi une simple colère condamne (Matthieu 5:22), la convoitise des yeux est assimilée à un adultère (Matthieu 5:28) et la haine à un meurtre (1 Jean 3:15). Il n'est pas nécessaire que le péché soit délibéré, pensé, voulu, prémédité, pour être péché. On peut pécher aussi par faiblesse, par ignorance ou par omission. L'homme est même coupable de la corruption qu'il a héritée en naissant dans ce monde et à laquelle il ne peut pas échapper. David confesse à Dieu qu'il est "né dans l'iniquité" et que sa mère l'a "conçu dans le péché" (Psaume 51:7). Pierre ne voulait pas renier Jésus (Matthieu 26:69-75), et Paul reconnaît qu'en persécutant les chrétiens il avait agi par ignorance (1 Timothée 1:13).

Nous ne saurons jamais pourquoi Dieu, sachant qu'elle aurait lieu, a permis la chute. Mais une chose est certaine, c'est qu'il ne l'a pas voulue. Elle a eu lieu parce que Satan a tenté l'homme et que celui-ci, parfaitement capable de résister à la tentation, mais oubliant ce que le Seigneur lui avait dit, lui a obéi. Aussi en est-il entièrement responsable, comme il est responsable de tous les péchés qu'il commet dans sa vie. Il est donc faux de dire que l'homme est neutre, quand il vient au monde, qu'il n'est ni mauvais ni bon, et qu'il ne devient mauvais qu'en suivant le mauvais exemple que lui donne son entourage. Il est aussi faux de dire que, malgré ses péchés, il est capable de faire quelque chose pour son salut.

La culpabilité:

La Loi divine accuse le pécheur et le déclare coupable: "Ce que dit la Loi, elle le dit à ceux qui sont sous la Loi, afin que toute bouche soit fermée et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu" (Romains 3:19). L'homme est coupable quand le Seigneur tient compte de son péché et le lui impute. Parce qu'il peut faire le contraire, ne pas imputer le péché ou, ce qui revient au même, le pardonner. Dans ce cas, quoique pécheur, l'homme n'est plus coupable à ses yeux. C'est ce que David confesse quand il s'écrie: "Heureux celui à qui la transgression est remise, à qui le péché est pardonné! Heureux l'homme à qui l'Eternel n'impute pas l'iniquité!" (Psaume 32:1.2; Romains 4:7.8).

La culpabilité est une réalité objective, indépendante de ce que l'homme ressent ou pas. Qu'il le reconnaisse ou non, qu'il l'admette ou le nie, il est coupable dès l'instant où il transgresse la Loi divine. Il ne faut donc pas confondre la culpabilité proprement dite avec le sentiment de culpabilité ressenti par l'homme, et ressenti généralement à des degrés divers. Certains hommes ont une conscience très délicate et sont conscients de leurs moindres fautes, tandis que d'autres semblent ne plus avoir de conscience du tout ou agissent contre leur conscience avec arrogance. L'apôtre Paul écrit aux Romains: "Quand les païens, qui n'ont point la Loi, font naturellement ce que prescrit la Loi, ils sont, eux qui n'ont point la Loi, une loi pour eux-mêmes. Ils montrent que l'oeuvre de la Loi est écrite dans leurs coeurs, leur conscience en rendant témoignage et leurs pensées s'accusant et se défendant tour à tour" (Romains 2:14.15). Ce texte affirme trois choses: que la Loi est inscrite dans le coeur de l'homme, que la conscience en rend témoignage, et que tour à tour elle prend sa défense ou l'accuse, selon qu'il agit bien ou mal.

La Bible déclare aussi que l'homme reste sous l'emprise d'une mauvaise conscience aussi longtemps qu'il n'a pas la certitude du pardon, certitude qu'on ne trouve que dans la mort du Christ: "Nous avons, au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire..., et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu. Approchons-nous donc avec un coeur sincère, dans la plénitude de la foi, les coeurs purifiés d'une mauvaise conscience" (Hébreux 10:19-22).

Le châtiment:

Le châtiment est la peine dont Dieu frappe le coupable. La Bible enseigne en effet: "Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la Loi et ne le met pas en pratique" (Galates 3:10). "La mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché... Par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes" (Romains 5:12.18). "Le salaire du péché, c'est la mort" (Romains 6:23). Cf. encore Job 34:11.12; Matthieu 5:26; 18:30; Romains 2:9; 3:23.

La mort est fondamentalement la séparation d'avec Dieu, source de toute vie. On distingue entre la mort spirituelle, la mort temporelle et la mort éternelle. La mort spirituelle est l'aliénation spirituelle de l'homme, le fait qu'il est loin de Dieu, qu'il refuse de faire sa volonté, le fuit et le hait. "Vous étiez morts par vos offenses et par vos péchés... Mais Dieu qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, nous qui étions morts par nos offenses, nous a rendus vivants avec Christ", écrit Paul aux anciens païens qu'étaient les chrétiens d'Ephèse, comparant la conversion à une résurrection spirituelle (Ephésiens 2:1.4.5). La mort éternelle est le châtiment éternel que Dieu réserve aux pécheurs sans pardon, le fait qu'ils souffriront dans le corps et dans l'âme et qu'ils seront éternellement réprouvés, rejetés loin de sa face. "Ils auront pour châtiment une ruine éternelle, loin de la face du Seigneur et de la gloire de sa force" (2 Thessaloniciens 1:9; Matthieu 25:46). Quant à la mort temporelle, elle est pour l'incroyant le passage dans la mort éternelle, et pour le croyant l'entrée dans la vie éternelle. Elle ne constitue donc plus pour ce dernier un châtiment, mais lui permet d'aller chez le Seigneur, en attendant le jour où son corps ressuscitera en gloire. Elle est pour lui un sommeil beaucoup plus qu'une mort.

Questions de révision et exercices:

 

4. LE PECHE ORIGINEL

La chute dans le péché:

La Bible affirme que l'origine du péché est la chute telle qu'elle est racontée par la Genèse (Genèse 3:1-19). L'Eglise luthérienne croit en l'historicité fondamentale de ce récit, ce qui signifie que la chute a eu lieu de la façon dont elle est racontée et que le récit qui en est fait échappe par définition à toute analyse critique. Elle fut l'oeuvre d'Adam et d'Eve, le premier couple humain. C'est par ce récit qu'il a plu au Seigneur d'expliquer l'origine du péché et de la mort et leur règne universel. Il ressort de ce texte que Satan est la cause principale de la chute et que le serpent en est la cause instrumentale (Apocalypse 12:9; 20:2). Il sema successivement le doute dans le coeur d'Eve, nia les conséquences du péché et la sainteté de Dieu en l'accusant de vouloir conserver un grand privilège pour lui-même, fit une fausse promesse au premier couple et éveilla de la sorte la concupiscence dans leur coeur, rendant le fruit désirable et suscitant l'envie d'en manger.

La raison humaine soulève à propos de ce récit un tas de questions et d'objections: Pourquoi Dieu a-t-il créé l'homme de façon à ce qu'il puisse succomber à la tentation? Pourquoi n'a-t-il pas empêché la chute, puisqu'il en connaissait à l'avance les conséquences désastreuses? Comment du reste l'homme, s'il était saint, pouvait-il être tenté par le mal? Ces questions restent sans réponses. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il a plu à Dieu de soumettre l'homme à une épreuve, tout en lui donnant les moyens de la surmonter, que la chute est pour l'homme une leçon d'humilité et qu'elle a donné au Seigneur la possibilité de manifester sa grande miséricorde en venant à son secours.

Qu'est-ce que le péché originel?

Nos abordons avec la doctrine du péché originel un point particulièrement important de l'enseignement de la Bible qui est contesté ou présenté de façon erronée par beaucoup d'Eglises. La raison humaine, en effet, ne peut ni accepter l'idée que tous les hommes sont coresponsables du péché d'Adam ni admettre leur totale déchéance et leur incapacité à faire quoi que ce soit pour leur salut. Elle est convaincue que, malgré ses fautes, ses lacunes, ses faiblesses et ses injustices, l'homme peut participer à l'oeuvre de sa réhabilitation et au moins rendre effective l'action qui consiste, de la part de Dieu, à le sauver. Luther, puis l'Eglise qui porte son nom ont dû élever la voix au XVI° siècle pour rejeter toute forme de synergisme et affirmer qu'en ce qui concerne le salut, l'homme ne coopère en aucune façon avec Dieu.

Le péché originel revêt deux aspects.

1) Il est tout d'abord l'imputation aux hommes du monde entier de la désobéissance d'Adam. C'est ce qu'enseigne l'apôtre Paul dans ce texte bien connu: "Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort s'est étendue à tous les hommes parce que tous ont péché... Si par l'offense d'un seul la mort a régné par lui seul, à combien plus forte raison l'abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus-Christ lui seul. Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l'obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes" (Romains 5:12-19).

On appelle cela la culpabilité héréditaire. Avant de devenir coupable aux yeux de Dieu par les péchés qu'il commet personnellement, l'homme l'est par nature, car il participe à la transgression d'Adam comme s'il l'avait commise lui-même. C'est une doctrine que la raison juge insensée et injuste. Mais qui est l'homme pour contester avec Dieu? Que celui qui se révolte contre une telle affirmation admette qu'il est tout aussi insensé et injuste de la part de Dieu d'imputer à son Fils innocent et pur les péchés du monde entier. On ne peut pas repousser la première affirmation tout en acceptant la seconde. Si la situation de l'humanité est désespérée en raison du péché originel, Dieu y apporte un remède parfait par le sacrifice du Christ. Ainsi l'homme est appelé en même temps à s'humilier devant le Seigneur et à glorifier sa bonté.

2) Mais le péché originel est aussi la transmission à toute l'humanité de la corruption d'Adam et d'Eve. L'homme vient au monde corrompu et incapable de mériter le salut par le bien qu'il fait. Adam engendra un fils non plus à l'image de Dieu, mais à sa propre image (Genèse 5:3). "Les pensées du coeur de l'homme sont mauvaises dès sa jeunesse" (Genèse 8:21). "Voici je suis né dans l'iniquité et ma mère m'a conçu dans le péché" (Psaume 51:7). "Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'Esprit est esprit" (Jean 3:6), si bien que l'homme est par nature "enfant de colère" (Ephésiens 2:3).

Cela signifie qu'il est "privé de la gloire de Dieu" (Romains 3:23), que le bien n'habite pas en lui (Romains 7:18), qu'il est méchant (Luc 11:13) et impur (Job 14:4). Sa situation est telle qu'il est spirituellement aveugle. Il a "l'intelligence obscurcie" (Ephésiens 4:18), marche dans les ténèbres (Ephésiens 5:8) et "n'accueille pas les choses qui sont de l'Esprit de Dieu, car elles sont pour lui une folie et il ne peut les connaître" (1 Corinthiens 2:14). Il est plein de convoitises mauvaises: "C'est du coeur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les calomnies" (Matthieu 15:18.19). Il est par nature l'ennemi de Dieu et de sa volonté (Romains 3:9-20; 5:10; 8:7; Colossiens 1:21), esclave du mal (Romains 3:9; 6:1.6.20; 7:14.23.24), spirituellement mort, par ses offenses et ses péchés (Ephésiens 2:1.5; Colossiens 2:13).

Voilà un tableau bien sombre de l'humanité, mais c'est ce qu'enseigne la Bible. C'est ce que confesse aussi l'Eglise luthérienne. Deux textes pour le montrer:

"Nous enseignons... qu'après la chute d'Adam, tous les hommes nés de manière naturelle sont conçus et nés dans le péché. C'est-à-dire que tous, dès le sein de leur mère, ils sont remplis de désirs et de penchants mauvais et que, par nature, il ne peut y avoir en eux ni vraie crainte de Dieu, ni vraie foi en Dieu. Nous enseignons aussi que cette corruption innée, ce péché originel est véritablement un péché et qu'il voue à la damnation et à la colère éternelle de Dieu tous ceux qui ne naissent pas de nouveau par le baptême et le Saint-Esprit" (Confession d'Augsbourg, Article II).

"Le péché originel est une corruption si pernicieuse et si profonde de la nature humaine qu'aucune raison ne peut le comprendre. Mais il faut le croire, car cela est révélé dans l'Ecriture" (Articles de Smalcalde, III, Article 1).

Cette doctrine a suscité bien des controverses. Certains, comme le moine Pélage qui vécut au début du V° siècle, la rejetaient entièrement, soutenant que l'homme est neutre, ni bon ni mauvais, et qu'il devient l'un ou l'autre par un choix personnel. Pour lui, le péché n'était péché que s'il y avait consentement personnel. C'est ce qu'on appelle le pélagianisme. Quant au semi-pélagianisme catholique ou protestant, appelé encore synergisme, il enseigne la réalité du péché originel, mais en limite la portée, soutenant que malgré sa corruption et ses fautes, l'homme est capable d'apporter une part à l'oeuvre de son salut. Il est donc invité à collaborer avec Dieu par ses oeuvres, ses bonnes dispositions ou son consentement. Le Seigneur fait appel à ses ressources spirituelles et lui demande de les mobiliser pour devenir participant de la vie éternelle. Dans ce cas, le salut n'est plus un don gratuit du ciel. C'est la raison pour laquelle l'Eglise luthérienne a farouchement rejeté le synergisme sous toutes ses formes. L'enjeu était rien moins que la gratuité totale du salut par la foi en Christ et la certitude de ce salut fondée sur les promesses de l'Evangile.

Questions de révision et exercices:

 

5. LE PECHE ACTUEL

Définition:

On appelle péché actuel, par opposition à péché originel, un péché qui se commet, une transgression ponctuelle de la Loi divine, que ce soit en pensées, en paroles ou en actes. "Quiconque pratique le péché transgresse la Loi, et le péché est la transgression de la Loi" (1 Jean 3:4). "Retirez-vous de moi, vous qui commettez l'iniquité" (Matthieu 7:23). "Si vous faites acception de personnes, vous commettez un péché" (Jacques 2:9). Ce sont des actes que la Bible appelle les oeuvres de la chair (Galates 5:19), les oeuvres stériles des ténèbres (Ephésiens 5:11), les oeuvres du vieil homme (Colossiens 3:9), des oeuvres mortes (Hébreux 6:1; 9:14) ou criminelles (2 Pierre 2:8). Cela dit, l'adjectif "actuel" est pris en son sens large, car ces péchés se commettent aussi en paroles et en pensées.

D'où vient le péché? Il a un certain nombre de causes dites internes, propres à l'homme. Il vient tout d'abord du coeur qui est mauvais: "C'est du coeur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les calomnies" (Matthieu 15:18.19). Ou, ce qui revient au même, de la chair. Saint Paul dit du mal qu'il commet maintenant qu'il est un chrétien: "Ce n'est plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi, c'est-à-dire dans ma chair" (Romains 7:17.18). L'homme pèche par ignorance. Ce fut le cas de l'apôtre avant sa conversion, quand il persécutait les chrétiens (1 Timothée 1:13). Il pèche aussi parce qu'il n'arrive pas à maîtriser ses émotions. Il a des manifestations passionnelles comme la crainte, la colère, la jalousie, la convoitise. C'est sous l'emprise de la passion que David commit adultère avec Bath-Schéba. C'est dans un mouvement de colère que les fils de Zébédée voulurent faire tomber le feu du ciel sur un village de la Samarie. C'est dans un moment de peur que Pierre renia son Maître. Tout cela parce que le coeur de l'homme est par nature porté vers le mal. Jacques dit avec beaucoup de lucidité: "Chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise. Puis la convoitise, lorsqu'elle a conçu, enfante le péché, et le péché, étant consommé, produit la mort" (Jacques 1:14).

Le péché a aussi des causes externes. Tout d'abord Satan. Jésus dit à Pierre qui allait le renier: "Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment" (Luc 22:31), et quand il lui dit un jour: "Arrière de moi, Satan", il flaira que le diable le tentait par son propre disciple (Matthieu 16:23). Paul dit des chrétiens d'Ephèse qu'ils marchaient avant leur conversion "selon le train de ce monde, selon le prince de la puissance de l'air, de l'esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion" (Ephésiens 2:2). Mais le croyant est aussi tenté par le monde, par le mauvais exemple que lui donnent les hommes, aussi Salomon exhorte-t-il en ces termes: "Mon fils, si des pécheurs veulent te séduire, ne te laisse pas gagner" (Proverbes 1:10), et Jésus nous demande-t-il de nous garder avec soin du levain des pharisiens et des sadducéens" (Matthieu 16:6). Combien de croyants, gagnés par le monde et ses séductions, sont déchus de la foi!

Classification des péchés:

On peut classser les péchés en plusieurs catégories, selon le point de vue auquel on se place. On distingue par exemple entre péchés volontaires ou délibérés et péchés de faiblesse. Cette distinction est extrêmement importante pour la cure d'âme. La volonté peut en effet être engagée à des degrés divers dans le péché. L'homme peut agir de façon délibérée voire préméditée, sachant qu'il fait le mal. C'était le cas d'Absalom (2 Samuel 15) et de Judas (Matthieu 26:14-16). Mais elle peut aussi passer à l'arrière-plan, quand on agit par ignorance, par inadvertance ou précipitation, sous l'effet d'une passion non contrôlée, par crainte ou par esprit de parti. Pierre renia le Christ par crainte (Luc 22:54-62), les disciples agirent sous l'effet de la jalousie (Matthieu 20:24). Les péchés de faiblesse que les chrétiens commettent encore chaque jour sont surtout les mauvaises pensées qui les assaillent et contre lesquelles ils ont du mal à lutter, les paroles non réfléchies et les gestes précipités. Un chrétien par définition ne commet de péché délibéré, en sachant sciemment qu'il fait le mal. En effet, il est gouverné par le Saint-Esprit. Il hait donc l'injustice et veut plaire à Dieu. Il est des péchés qu'on ne peut pas commettre tant qu'on est guidé et régi par l'Esprit de Dieu. Ce sont ceux dont la Bible dit que ceux qui les commettent ne verront pas le Royaume de Dieu (Romains 6:9.10).

On distingue aussi entre péché en connaissance de cause et péché par ignorance. Un péché n'a pas la même gravité selon qu'on le commet en sachant très bien qu'on fait le mal ou selon qu'on agit dans l'ignorance ou encore dans le doute. Jésus dit des Juifs qui veulent sa mort que leur péché est plus grand que celui de Ponce Pilate (Jean 19:11). Le serviteur qui a mal agi, tout en connaissant la volonté de son maître, sera puni plus sévèrement que celui qui ne l'a pas connue (Luc 12:47.48). Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement au jour du jugement que les villes de la Galilée qui ont eu le privilège d'entendre le Christ les appeler à la repentance (Matthieu 11:22).

Il y a péché par ignorance quand on est mal instruit et qu'on agit à cause de cela. C'est le cas par exemple de celui à qui on a appris qu'il fallait invoquer la Vierge et les saints et qui ignore que c'est contraire à l'Ecriture Sainte et, d'une façon générale, de tous les chrétiens victimes de fausses doctrines, dans la mesure où celles-ci ne renversent pas le fondement de la foi. Enfin, comme l'affirme le dicton, "dans le doute, abstiens-toi", ce que l'apôtre Paul formule de la façon suivante: "Tout ce qui n'est pas le produit d'une conviction est péché" (Romains 14:23).

Il y a aussi les péchés contre Dieu, contre le prochain et contre soi-même. Ils diffèrent par leur objet. Il y a péché contre Dieu quand on transgresse la première table de la Loi, et péché contre le prochain quand on viole ceux de la deuxième table. Mais en soi tout péché est péché contre Dieu, au moins indirectement, car il est transgression de sa volonté. Joseph s'abstint de commettre adultère pour ne pas pécher contre Dieu (Genèse 39:9), et le fils prodigue de la parabole confessa qu'il avait péché contre le ciel et contre son père (Luc 15:21). Enfin, on pèche contre soi-même quand on nuit à son corps ou son âme (abus d'alcool ou de tabac, recours aux drogues, entraînement sportif au-delà de ses limites personnelles, etc.).

L'Eglise catholique distingue traditionnellement entre péchés véniels et péchés mortels (cf. les sept péchés capitaux). Elle répertorie donc les péchés selon leur degré de gravité. C'est oublier que tout péché est mortel en ce sens qu'il entraîne la mort. "Le salaire du péché, c'est la mort" (Romains 6:23), et c'est vrai en soi de toute transgression de la Loi. Enfin, un péché n'est jamais véniel (c'est-à-dire pardonnable) en soi en ce qu'il mériterait le pardon, comme inversement tout péché est pardonnable parce que Dieu veut le pardonner. Ce n'est donc pas une question de gravité. Tous les péchés des incroyants sont mortels, et tous les péchés des croyants véniels. Tout dépend du statut de celui qui les commet. Les péchés, quels qu'ils soient, sont pardonnés à celui qui s'en repent sincèrement et qui croit en Christ, comme tous les péchés condamnent ceux qui vivent dans l'impénitence. Cependant, on peut appeler péché mortel chez le croyant tout péché délibéré commis contre les injonctions de la conscience et qui n'est pas suivi de la repentance, ou, ce qui revient au même, tout péché qui montre que celui qui l'a commis n'était plus sous la grâce, mais avait sombré dans l'impénitence (1 Corinthiens 6:9.10).

On distingue encore entre péchés de commission et péchés d'omission. Cette distinction est, elle aussi, très importante dans la prédication et la cure d'âme. Le serviteur qui a connu la volonté de son maître et qui ne l'a pas faite sera battu d'un plus grand nombre de coups que celui qui ne l'a pas connue (Luc 12:47). "Celui qui sait faire le bien et qui ne le fait pas commet un péché" (Jacques 4:17). On pèche en faisant le mal qu'on ne doit pas faire, mais on pèche aussi en ne faisant pas le bien qu'on doit faire. Les péchés d'omission ne sont pas en soi et a priori moins graves que les péchés de commission. Par contre, ils sont sans doute plus nombreux chez les chrétiens que ces derniers.

Enfin, un péché est impardonnable non en raison de sa gravité, mais lorsque celui qui le commet est dans un état tel qu'il ne peut plus se repentir. On appelle cela l'endurcissement, dont pharaon avait été un exemple éloquent (cf. le récit des plaies d'Egypte, Exode 7-11) et dans lequel Israël sombra en refusant d'écouter la voix de ses prophètes, puis celle du Christ. Dieu a fini par frapper son peuple d'aveuglement: "Il a aveuglé leurs yeux et il a endurci leur coeur, de peur qu'ils ne voient de leurs yeux, qu'ils ne comprennent du coeur, qu'ils ne se convertissent et que je ne les guérisse" (Jean 12:40). "Ils sont devenus durs d'entendement" et ont un voile sur les yeux quand ils lisent l'Ancien Testament dans leurs synagogues, dit Paul (2 Corinthiens 3:14-16). Jésus déclare en particulier que le blasphème contre le Saint-Esprit ne peut pas être pardonné (Matthieu 12:31.32) et l'apôtre Jean affirme qu'il existe un péché qui "mène à la mort" pour lequel il est vain de prier (1 Jean 5:16).

 

6. LE LIBRE-ARBITRE

Le mot "libre-arbitre" soulève le problème de la liberté de l'homme. L'homme est-il libre? Si on songe à une liberté absolue lui permettant de faire tout ce qu'il veut, il est évident qu'il ne l'est pas. Dieu seul est libre en ce sens et "fait tout ce qu'il veut" (Psaume 115:3). Il n'est pas libre non plus en ce qu'il a des obligations physiques et morales. Il est obligé de travailler et de se nourrir pour vivre, et en ce qui concerne la morale, il y a des choses qu'il ne peut pas faire, parce que sa conscience les lui interdit.

Par contre, il jouit d'une certaine liberté extérieure qui lui permet de faire des choix, de disposer de sa vie au moins dans une certaine mesure. Il peut décider de se marier ou de rester célibataire, de choisir son métier, son domicile ou ses amis, etc. Il peut décider également de s'astreindre à une certaine discipline et de vivre selon certains critères, de se vautrer dans le vice ou de mener une vie honorable et juste, d'être voleur ou honnête, menteur ou véridique, méchant et cruel ou bon et généreux. Il peut même décider de commettre ou de ne pas commettre certains péchés. On appelle cela la liberté extérieure qui lui permet de pratiquer une certaine justice appelée justice civile.

Cependant si par libre-arbitre on comprend l'aptitude à accomplir la volonté de Dieu et à acquérir une justice qui serve à l'obtention du salut, il faut affirmer avec clarté que l'homme ne la possède pas. La Bible dit qu'il est "chair" né de la chair (Jean 3:6), que "l'affection de la chair est inimitié contre Dieu" (Romains 8:7), que "les pensées du coeur de l'homme sont mauvaises dès sa jeunesse" (Genèse 8:21), que l'homme est mort par ses offenses et ses péchés (Ephésiens 2:1), ennemi de Dieu (Romains 5:10), que sans le Christ il ne peut rien faire (Jean 15:5.6). Cf. encore Genèse 6:3; Romains 3:10-19; 7:8-10.14; Galates 5:16; Ephésiens 2:3; Colossiens 1:21; 2:13. La situation naturelle de l'homme est telle qu'il est sous la malédiction de la Loi et incapable de s'en libérer: "Tous ceux qui s'attachent aux oeuvres de la loi sont sous la malédiction, car il est écrit: Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la loi et ne le met pas en pratique... Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit: Maudit est quiconque est pendu au bois" (Galates 3:10.13).

D'autre part, l'Evangile n'est pas un message qui l'attire. "La prédication de la croix est une folie", le Christ crucifié "scandale pour les juifs, folie pour les païens" (1 Corinthiens 1:18.21.23; 2:8). Enfin, la Bible affirme avec beaucoup d'insistance que le salut est l'oeuvre de Dieu seul, un don gratuit de sa miséricorde, qu'il ne s'obtient pas par les oeuvres, que les croyants sont gratuitement justifiés par sa grâce (Romains 3:23; 9: 16; 11:5.6; Ephésiens 2:8.9).

L'homme naturel ne peut même pas se prédisposer à la grâce ou participer de façon active à sa conversion. Il est converti par la grâce de Dieu qui, par l'Evangile, change son coeur et le régénère. C'est Dieu qui ouvre les coeurs et y fait naître la foi (Actes 16;:14), qui fait briller la lumière dans les ténèbres (2 Corinthiens 4:16), qui attire les pécheurs à Jésus-Christ: "Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m'a envoyé ne l'attire" (Jean 6:44). Dieu donne la "grâce de croire" (Philippiens 1:29) et de persévérer dans la foi en rendant "parfaite pour le jour de Jésus-Christ" la "bonne oeuvre" commencée en nous (Philippiens 1:6; 1 Pierre 1:5; 5:10).

Ce sont là autant de façons différentes de dire que l'homme ne peut en rien contribuer à sa réhabilitation et son salut. Il dépend entièrement de la grâce de Dieu et ne peut que tendre la main pour se laisser secourir. En un mot, il n'a pas de libre-arbitre lui permettant de collaborer avec la grâce divine et de participer activement, de quelque façon que ce soit, à son salut.

La Formule de Concorde qui mit fin au XVI° siècle à un certain nombre de controverses dans l'Eglise luthérienne, notamment concernant le libre-arbitre, s'exprime avec beaucoup de clarté quand elle dit:

"Nous croyons que, dans l'ordre des choses spirituelles et divines, la raison, le coeur et la volonté de l'homme non régénéré ne peuvent par leurs propres forces naturelles rien comprendre, rien croire, rien accepter, rien concevoir, rien vouloir, rien commencer, rien accomplir, rien faire, rien opérer, rien coopérer en quoi que ce soit. L'homme est entièrement corrompu et mort au bien, de telle sorte que dans la nature de l'homme après la chute et avant la régénération, il ne subsiste pas même une étincelle de forces spirituelles grâce auxquelles il pourrait se préparer à recevoir la grâce de Dieu ou la saisir quand elle est offerte, ou être de lui-même et par lui-même apte à la recevoir et s'y disposer ou contribuer à sa conversion" (Solida Declaratio, II, 7).

Questions de révision et exercices:

 


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3-Oct-2002, Rev. David Milette.